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Marché : Pourquoi la baisse du pétrole pourrait ne pas durer

samedi 20 août 2022 à 07h00
L'embargo européen sur le pétrole russe pourrait tendre le marché

(BFM Bourse) - Les cours de la matière première connaissent une importante chute depuis le mois de juin. Mais plusieurs facteurs, tels qu’une reprise de la demande chinoise ou de possibles tempêtes aux Etats-Unis, risquent de renverser la tendance.

La flambée de l’or noir a fait long feu. Alors que le conflit en Ukraine et la perspective d’un arrêt des exportations russes lui a permis de tutoyer les 140 dollars, le pétrole subit depuis début juin une importante correction de ses cours, d’environ 25%.

Les raisons de cette chute sont nombreuses. "Le marché a décidé de voir le verre à moitié plein" et de se concentrer sur "tous les points qui justifient une baisse", résume Benjamin Louvet, gérant matières premières chez OFI AM, interviewé mercredi sur BFM Business.

Globalement, les investisseurs s’inquiètent d’une potentielle dégradation de la conjoncture qui pèserait sur la demande mondiale. La Chine, en particulier, préoccupe les marchés. Cette semaine la deuxième économie mondiale a publié des indicateurs d’activité – les ventes de détail et la production industrielle – en berne. La stratégie zéro-Covid du pays, qui l’amène à prendre des mesures drastiques pour enrayer les cas de contaminations, pénalise l’activité du pays.

L’accord iranien comme épée de Damoclès

La vigueur du dollar pèse également sur les cours. Les prix du baril étant libellés dans la devise américaine, un dollar plus fort rend plus onéreux les achats d’importateurs dont les opérations s’effectuent dans une autre monnaie.

Plus récemment, les contrats pétroliers ont pâti de la perspective d’un accord sur le nucléaire iranien, qui pourrait lever les restrictions à l’export de l’Iran, un important membre de l’Opep (organisation des pays exportateurs de pétrole). Selon Bloomberg, le pays du Moyen-Orient produit actuellement environ 2,5 millions de barils par jour. Le pays pourrait, en cas d’accord, revenir en six mois à un niveau proche de ses pleines capacités de production, de 3,7 millions de barils par jour, explique à l’agence de presse américaine, Iman Nasseri, directeur de la société de conseil FGE.

Citée par l’AFP, Goldman Sachs, juge néanmoins qu’un accord à court terme reste "peu probable". Selon la banque américaine, l'Iran "se montre prêt à discuter sur le nucléaire pour faire durer les négociations et éviter de nouvelles sanctions", et "les États-Unis ont de la même façon intérêt à faire traîner le dossier".

La baisse du marché a évidemment des effets des vertueux pour les ménages, qui voient les prix à la pompe chuter. En France, le prix moyen du gazole s’est établi à 1,79 euro lors de la semaine achevée le 12 août, un niveau inédit depuis le début de l’année.

Une "fausse impression de confort"

Toutefois plusieurs facteurs pourraient amener les prix à se stabiliser voire remonter. FGE Energy juge que le marché a récemment été "survendu", et que les risques entourant les cours sont "orientés à la hausse".

"On pourrait très vite repasser dans une situation de tension. Il faut se méfier de cette fausse impression de confort que l’on a aujourd’hui sur le marché du pétrole", prévient de son côté Benjamin Louvet.

UBS évoque plusieurs catalyseurs. La banque suisse juge que la demande chinoise est parée pour se redresser, favorisée par des politiques de relance, telles qu’une augmentation des dépenses budgétaires, des baisses d’impôts ou encore des investissements dans les infrastructures. L'établissement helvète estime également que les prix élevés du gaz et du charbon pourraient favoriser l’utilisation du pétrole comme combustible pour produire de l’électricité, ce qui tirerait la demande.

La banque suisse prévient aussi que la production de l’Opep+, qui regroupe l’Opep et dix autres pays dont le Mexique, devrait être minée par une baisse du côté de la Russie. L’Union européenne a décidé d’interdire la quasi-totalité de ses importations de pétrole russe d’ici à la fin de l’année, ce qui représente une coupe de près de 3 millions de barils par jour, selon l’établissement. "Cela pourrait déclencher un recul de la production de pétrole russe et tendre davantage le marché pétrolier", juge UBS.

"Déplétion naturelle"

Benjamin Louvet souligne également que la saison des ouragans sur le bassin atlantique risque de perturber le marché." Durant cette période-là, un certain nombre de phénomènes météorologiques, de dépressions, se créent sur l’Atlantique et finissent parfois leur course au milieu du Golfe du Mexique, contraignant la production américaine à fermer", détaille-t-il. "Si on avait un gros ouragan qui devait se diriger vers les plateformes pétrolières cela pourrait à nouveau inquiéter le marché", met en garde le spécialiste.

Au-delà du court et du moyen terme, les tendances structurelles poussent les prix vers le haut. "Le pétrole est un marché un peu particulier: si vous ne faites rien tous les ans la production d’un puits de pétrole diminue d’à peu près 4% à 5%, c’est ce qu’on appelle la déplétion naturelle", explique Benjamin Louvet. Or "compte tenu des contraintes environnementales, de la nécessité de faire la transition énergétique pour prendre en compte le changement climatique, les investissements dans le secteur pétrolier ont été insuffisants ces cinq-six dernières années pour compenser cette baisse de la production", poursuit-il.

"La consommation ne cesse d’augmenter – on devrait atteindre un nouveau record cette année – et de l’autre côté la production sera de plus en plus contrainte", résume Benjamin Louvet.

L’expert voit le marché se stabiliser à des niveaux proches des 100 dollars le baril. UBS, de son côté, est plus "bullish" selon l’expression idoine dans le jargon boursier. La banque suisse table sur un baril de Brent à 125 dollars d’ici à la fin de l’année.

Par Julien Marion

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