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Marché : Ce scénario noir où le pétrole tutoie les 160 dollars le baril

mardi 31 octobre 2023 à 10h03
La Banque mondiale a étudié plusieurs scénarios pour le pétrole

(BFM Bourse) - La Banque mondiale a publié lundi une étude tentant d'évaluer les potentiels impacts du conflit au Proche-Orient sur les cours de l'or noir. Si, dans son hypothèse de référence, le baril de Brent resterait assez proche de ses niveaux actuels, l'institution a également songé à d'autres scénarios dont un où les prix se situeraient entre 140 dollars et 157 dollars le baril.

Depuis début octobre le marché suit avec la grande attention l'évolution du conflit entre Israël et le Hamas. Avec un actif plus particulièrement concerné : le pétrole. L'or noir connaît depuis environ deux mois une forte volatilité qui a été exacerbée par l'intensification de cette guerre.

Les investisseurs redoutent une extension de ce conflit aux pays voisins producteurs de pétrole, l'Iran notamment. Ce qui aurait donc un impact sur la production de pétrole et pousserait davantage les prix à la hausse dans un marché qui souffre déjà d'un déficit d'offre, en raison des coupes de production de l'Arabie saoudite et de la Russie. L'Opep évalue ce déficit à 3 millions de baril par jour sur l'ensemble du quatrième trimestre.

Le sujet est suffisamment préoccupant pour que la Banque mondiale consacre un rapport spécial sur l'impact potentiel de ce conflit sur les cours du pétrole (et plus largement des matières premières). Et au vu de l'incertitude relative à l'ampleur de ce conflit, l'institution a dressé quatre scénarios dont un "catastrophe".

La Banque mondiale note que, jusqu'à présent, cette guerre n'a eu que des répercussions "contenues" sur les matières premières.

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Sur la base de précédent conflits

Son scénario de base, et donc celui auquel elle accorde une plus grande probabilité, ne prévoit pas que la donne change. La Banque mondiale part du principe que le conflit ne s'élargit pas, et aura ainsi des effets limités sur les cours de l'or noir. Le prix du pétrole, mesuré par le contrat sur le Brent de mer du Nord, la référence internationale des cours du brut, resterait autour de 90 dollars le baril au quatrième trimestre 2023 (le trimestre en cours donc) avant de refluer à 81 dollars l'an prochain.

Voilà pour le scénario référence. Mais que se passerait-il si ce conflit commençait à connaître une escalade et perturbait ainsi l'offre de pétrole? La banque mondiale a retenu trois cas de figure.

"Ces scénarios ne spéculent pas sur les déclencheurs potentiels de l'escalade du conflit et les ruptures d'approvisionnement qui s'ensuivent, parce que la situation est fluide et que les épisodes précédents ont été provoqués par divers facteurs. Cependant, ces scénarios tiennent compte des similitudes avec les précédentes ruptures d'approvisionnement d'origine géopolitique", explique la Banque mondiale.

Dans le premier cas, appelé "petite perturbation", l'offre de pétrole serait réduite de 500.000 à 2 millions de barils par jour en raison du conflit, une réduction comparable à ce qui s'est produit lors de la guerre civile libyenne en 2011, explique la Banque mondiale. Elle table alors sur un cours du Brent entre 93 dollars et 103 dollars le baril au quatrième trimestre, soit des prix relativement élevés mais qui sont monnaie courante ces dernières années.

Tout se complique avec le scénario "moyenne perturbation" où l'offre serait cette fois diminuée de 3 à 5 millions de barils par jour, soit 3% à 5% de la production mondiale. "Cette réduction serait comparable à la perte de 3% de l'approvisionnement mondial en pétrole pendant la guerre en Irak en 2003", fait valoir la Banque mondiale. L'institution anticipe alors dans ce cas de figure un baril de Brent compris entre 109 dollars et 121 dollars le baril sur le quatrième trimestre 2023.

Un scénario cygne noir

Reste le scénario catastrophe, qui semble s'apparenter à un cygne noir: celui d'une "importante perturbation". "Dans ce scénario, la crise est supposée se transformer en un conflit régional qui malmène fortement l'approvisionnement en pétrole", explique la Banque mondiale. L'offre de pétrole serait sabrée de 6 à 8 millions de barils par jour, amputant la production totale de 6% à 8%. "Ce scénario est comparable aux perturbations initiales liées à l'embargo sur le pétrole arabe en 1973, qui a entraîné une perte de près de près de 7,5 % de l'approvisionnement mondial en pétrole à cette époque", explique l'institution.

A la suite de la guerre du Kippour de 1973 entre Israël et ses voisins arabes, les pays du Golfe avaient décidé, en guise de mesure de rétorsion, de diminuer la production, l'Arabie saoudite allant jusqu'à instaurer un embargo de ses exportations vers les Etats-Unis. Il s'agit du premier grand choc pétrolier de l'histoire. "C’est la panique et le prix du baril flambe. En quelques semaines, il sera multiplié par quatre, passant de 4 à 16 dollars. Les économies occidentales ne peuvent pas faire face. La croissance s’effondre et le chômage augmente", rappelle le site économie.gouv.

Dans ce cas de figure extrême, le prix du pétrole pourrait alors se situer entre 140 dollars et 157 dollars le baril sur le quatrième trimestre, projette la Banque mondiale.

Notons néanmoins que la Banque mondiale ne se prononce pas sur la durée des perturbations ou de leurs effets sur le marché. Si les mesures des pays arabes prises dans le cadre du choc pétrolier de 1973 n'avaient duré que cinq mois, leur impact sur les prix avaient perduré bien au-delà car jamais les cours ne sont revenus à leur niveau antérieur à ces évènements.

Des effets généralement de courte durée

Mais dans les faits, les conflits dans les pays pétroliers n'ont généralement qu'un impact assez bref. La Banque mondiale rappelle elle-même que la guerre entre l'Iran et l'Irak en 1980 n'avait entraîné qu'une hausse "brève" des cours. "De même, la flambée des prix après l'invasion du Koweït par l'Irak en août 1990 a été de courte durée et s'est calmée dès qu'il est apparu début 1991 que le Koweït serait libéré par les forces occidentales", souligne-t-elle.

De plus, ces scénarios établis par la Banque mondiale se basent sur des précédents. Mais ils n'intègrent pas d'autres facteurs externes. La Banque mondiale reconnaît elle-même que ces impacts peuvent très bien être modérés par des décisions de l'Opep+ (l'Organisation des pays exportateurs de pétrole à laquelle s'ajoutent des alliés comme la Russie) pour augmenter sa production, ou par la libération des réserves stratégiques de la part des Etats-Unis.

"Indépendamment de ces risques, les prix du pétrole pourraient refluer, via une baisse de la demande de la part de la Chine, qui pourrait s'inscrire dans le cadre d'un ralentissement plus large de l'activité économique mondiale", note l'organisation internationale.

Pour l'heure, le conflit entre Israël et le Hamas s'inscrit clairement dans le scénario de référence de la Banque mondiale sans impact sur la production. Après avoir nettement progressé, les cours du pétrole se situent à des niveaux mesurés, avec un Brent à un peu plus de 87 dollars le baril.

"La deuxième étape de la réponse d’Israël aux attaques du 7 octobre a commencé (…) avec l’entrée de troupes et de tanks à Gaza. Le marché réagit plutôt bien car cette réponse est plus prudente qu’initialement annoncée", a expliqué lundi Xavier Chapard de LBPAM.

"Le pétrole reste sous les 90 dollars par baril (…) Il n’en reste pas moins que la réponse d’Israël devrait prendre du temps et que le risque d’extension du conflit reste présent. Nous pensons donc qu’une certaine prime de risque devrait persister dans les prochaines semaines, ce qui empêcherait le pétrole et le dollar de baisser davantage à court terme", a-t-il poursuivi.

Julien Marion - ©2025 BFM Bourse
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