(BFM Bourse) - Les deux groupes sont entrés en négociations exclusives pour créer une co-entreprise tournée vers les services de paiements aux commerçants en France. Une alliance qui permettrait à Worldline de se renforcer considérablement dans l'Hexagone.

Worldline est parvenu à faire sauter un important verrou. Dans le secteur des paiements, les services aux commerçants en France sont historiquement dominés par les grands groupes bancaires, ce qui n'est pas le cas dans d'autres pays. Ce qui explique l'importance, jusqu'ici, très relative de ce marché pour la société tricolore, l'Hexagone représentant environ 10% du chiffre d'affaires de Worldline.

Mais il semblait écrit que les établissements tricolores, à l'image de ce qui s'est produit dans d'autres pays (en Allemagne par exemple), auraient un jour recours à l'expertise des spécialistes des paiements pour renforcer leur expertise dans ces activités.

Crédit Agricole est ainsi le premier à franchir le pas. La banque mutualiste avait déjà tenté de s'associer à un spécialiste du secteur, en 2018, avec l'allemand Wirecard, la star déchue des paiements. La faillite en 2020 de la fintech, à la suite d'irrégularités comptables gargantuesques, a évidemment rebattu les cartes.

Une coentreprise effective en 2025

Cette fois Crédit Agricole a donc choisi de s'allier à Worldline et les deux sociétés sont entrées ce mercredi en négociations exclusives pour créer une co-entreprise dans les services aux commerçants en France.

Cette société serait détenue à 50% du capital plus une action par Worldline et à donc quasiment 50% par Crédit Agricole. Les deux groupes vont travailler en 2023 et 2024 sur "une phase" d'investissements communs d'un montant de 80 millions d'euros, destinée notamment à l'élaboration des produits et des offres de cette coentreprise. Cette dernière sera opérationnelle à compter de 2025, selon le calendrier prévisionnelle des deux groupes.

Cette union doit permette aux deux sociétés de capter au mieux un marché français conséquent, les volumes de chiffres d'affaires des commerçants étant estimé à 700 milliards d'euros sur une base annuelle.

Worldline livrera son expertise technologique dans les solutions et les plateformes de paiements pour les commerçants, que ce soit pour le commerce physique ou en ligne, tandis que Crédit Agricole apportera son important réseaux de distribution (16.000 conseillers entreprises en France) et sa connaissance du marché français.

"Ce projet est pour Worldline une opportunité unique d’accélérer son empreinte géographique et d’étendre davantage ses activités d’acquisition commerçants en Europe continentale. En parallèle, grâce à ce projet de partenariat stratégique, Worldline exploitera de nouvelles offres spécifiques au marché français", a déclaré Gilles Grapinet, le directeur général de Worldline, cité dans un communiqué.

Economies d'échelle

La société n'a pas donné d'estimation sur la trajectoire de ses revenus ou ses marges. Mais la banque Jefferies retient, dans une note, un impact de 100 points de base (1%) par an sur le chiffre d'affaires de la division "services aux commerçants" de Worldline.

"Il est difficile d’évaluer l’impact financier de cet accord, mais ce dernier est selon nous loin d’être négligeable. Il confirme surtout le rôle de Worldline de consolidateur des services de paiement en Europe", considère de son côté Invest Securities.

A la Bourse de Paris, l'action Worldline a ouvert en hausse de près de 8% avant que le marché modère son enthousiasme. Vers 14h20, le titre avance de 2,3% et signe la plus forte progression du CAC 40.

"C'est un grand coup pour Worldline", commente un analyste financier. "Cela va permettre à Worldline de proposer à ses clients une offre plus complète, de capter de plus grands volumes, de créer d'importantes économies d'échelles, puisque les paiements sont avant tout une industrie de coûts fixes, et donc d'être plus compétitif", souligne cet expert. "Maintenant la question est de savoir si les autres banques françaises vont suivre l'exemple de Crédit Agricole", ajoute-t-il.