(BFM Bourse) - La banque Oddo BHF avait publié une étude avant les élections européennes listant certaines valeurs à suivre après l'issue de ce scrutin. Parmi elles figurent les constructeurs automobiles, les groupes de défense et les semi-conducteurs.
Si les élections européennes ont constitué un choc politique en France, car suivies de l'annonce de la dissolution de l'Assemblée nationale, la donne est différente à l'échelle européenne.
D'après des estimations citées par l'Agence France Presse (AFP), les droites nationalistes et radicales progresseraient au sein du Parlement européen, mais avec un gain limité (passant de 118 à 131 députés sur 720). La "grande coalition" composée de la droite (PPE), des centristes (Renew Europe) et des sociaux-démocrates devrait conserver une majorité de 404 sièges. Ce processus doit également aboutir à une nouvelle Commission européenne, qui sera vraisemblablement encore dirigée par la présidente sortante, Ursula von der Leyen.
Quels secteurs et actions feront face à d'importants défis avec cette nouvelle mandature européenne? Dans une note publiée avant ce scrutin, le courtier Oddo BHF donnait quelques exemples, citant aussi des valeurs à privilégier.
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Le "Chips Act" pour les semi-conducteurs
La banque évoquait notamment les semi-conducteurs, avec le franco-italien STMicroelectronics, l'allemand Infineon Technologies, et les néerlandais ASML, ASMi et BE Semiconductors Industries.
Ces titres bénéficieront directement ou indirectement de "l'European Chips Act", entré en vigueur en septembre 2023. Ce règlement européen vise à doubler la part des groupes européens dans la production mondiale de puces, de 10% à 20%, d'ici à 2030. L'élaboration de ce texte avait été déclenchée par les pénuries d'approvisionnement en puces dans plusieurs industries (notamment l'automobile) qui ont conduit les dirigeants à vouloir relocaliser une partie de la production sur le Vieux continent. Ce qui passe par une enveloppe de 43 milliards d'euros de fonds privés et publics.
"L’objectif est considéré par beaucoup d’acteurs comme trop ambitieux, car passer de 10% à 20% dans un marché qui devrait doubler d’ici 2030, signifie quadrupler la production", relève Oddo BHF. Mais le courtier considère que dans n'importe quel scénario électoral, l'"European Chips Act ne sera pas remis en cause". "Il est même nécessaire qu’il soit renforcé pour atteindre l’objectif de 20% de semiconducteurs fabriqués en Union européenne", expliquait le bureau d'études.
Une "prise de conscience" pour la défense
La défense constitue un autre secteur pouvant potentiellement bénéficier de récentes ou nouvelles initiatives. L'éclatement de la guerre en Ukraine a constitué une prise de conscience tardive du sous-investissement de nombreux pays dans ce domaine, car la défense avait auparavant une importance secondaire (c'est un euphémisme) à l'échelle européenne.
"Nous estimons que les 27 membres de l’Union européenne poursuivront leur effort d’investissement dans la défense pour tangenter le seuil de 2% du PIB dès cette année avant de tendre vers 2,5% en 2028-29, à la fin du mandat de la nouvelle Commission", jugeait Oddo BHF.
Si la défense demeure avant tout un sujet national, la Commission européenne a récemment proposé un mécanisme européen de ventes militaires, avec l'objectif d'acquérir 40% des équipements de manière commune et 50% pour les équipements produits au sein de l'Union européenne.
Cette prise de conscience tardive du rôle de l'Europe dans la défense devrait se traduire "par des budgets supplémentaires qui irrigueront tous les titres exposés à cette thématique", écrivait encore Oddo BHF. Ce qui est plus particulièrement positif pour les groupes fortement exposés aux pays européens, le courtier citant les allemands Hensoldt (86% des revenus en Europe) et Rheinmetall (71%), le français Thales (69% des revenus de la division Défense et Sécurité) ainsi que le suédois Saab (65%).
L'automobile en première ligne
L'automobile a été au premier plan de la campagne électorale. L''interdiction des ventes de véhicules neufs thermiques à l'horizon 2035 pour la très grande majorité des constructeurs est ainsi souvent revenue dans les débats entre les têtes de listes. Rappelons qu'une clause de revoyure à l'horizon 2026 existe sur cette ambition.
"Le renforcement attendu de la frange populiste au sein du parlement européen soulève le risque de céder à des considérations plus court-termistes qui pourraient remettre en cause la trajectoire d’électrification du bloc (européen, NDLR)", écrivait Oddo BHF. Les sujets épineux liés aux menaces de suppressions de postes, à la perte de compétitivité face à la Chine ou aux prix trop élevés des véhicules électriques constituent autant d'argument potentiels qui pourraient trouver un écho auprès de certains élus, et pas seulement à l'extrême droite, mais aussi au sein du plus important parti du Parlement européen le PPE (conservateurs), soulignait Oddo BHF.
"Plus globalement, la montée du sentiment eurosceptique pourrait affaiblir l’Union face à ses concurrents. La Chine et les Etats-Unis ont tous deux déployé des politiques de soutien public très généreuses envers le secteur automobile ces dernières années, la première avec des subventions sur l’électrique qui ont créé des champions nationaux sur le segment, et les seconds avec un plan de réindustrialisation (IRA) qui a provoqué un afflux massif d’investissements dans le pays", analyse le courtier. "La compétitivité européenne s’est retrouvée fortement grevée par ces initiatives, provoquant des appels pour un IRA à l’européenne", ajoute le bureau d'études.
Certes, dans l'absolu, un décalage des ambitions européennes en matière d'électrification, pourrait être reçu positivement à court terme. Mais ces interrogations créent une incertitude malvenue alors que nombre de groupes automobiles ont engagé des dépenses d'investissements importantes sur des cycles longs, de sept à dix ans.
Stellantis et Renault à privilégier
"Ainsi, un changement tardif des règles pourrait être très coûteux pour les constructeurs et les équipementiers qui ont déjà engagé d’importants investissements dans la transition énergétique. En sus, l’extension de la durée de vie du moteur thermique contraindrait les constructeurs à investir sur deux modes d’énergie au lieu d’un et, sans doute aussi, à perdre en compétitivité à l’international", jugeait Oddo BHF.
Dans ce contexte, le courtier notait que le climat d'incertitudes plaide en faveur des groupes les plus flexibles, comme Stellantis et BMW, qui disposent de plateforme (socle de production commun du bas des véhicules pour différents modèles) multi-énergies, et peuvent ainsi s'adapter, ainsi que pour Renault, en raison de son exposition européenne, un marché bien plus sain que l'hyperconcurrentielle Chine. "A l’inverse, les équipementiers seraient, encore, les premières victimes" d'un changement de braquet de l'Union européenne, prévenait Oddo BHF.
D'autres impacts sectoriels – que nous n'avons pas choisi de développer - ont été étudiés par le courtier sur certains secteurs. Par exemple, Oddo BHF estimait qu'un assouplissement des politiques européennes en matière de consolidation pour les compagnies aériennes bénéficierait aux grandes majors (Air France-KLM, IAG, Lufthansa) ou que la poursuite de la décarbonation avec un objectif intermédiaire de réduction de Co2 en 2040 (avant la neutralité totale en 2050) bénéficierait aux compagnies pétrolières les plus avancées en matière de décarbonation, comme Totalenergies, Repsol et Eni. "Une inflexion notable de la politique européenne en matière de souveraineté technologique dans le cloud" pourrait également avoir un impact favorable sur des acteurs tels que OVHcloud ou l'allemand IONOS "mais aussi sur Dassault Systèmes qui dispose de sa propre infrastructure cloud", expliquait encore Oddo BHF.
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