(BFM Bourse) - Omnicom a décidé de racheter son rival Interpublic pour créer le numéro un mondial de la publicité. Une opération qui devrait, paradoxalement, bénéficier à Publicis.
Un big bang dans le secteur de la publicité. Dimanche, le Wall Street Journal a rapporté qu'Omnicom, le troisième acteur mondial, était en discussions avancées pour racheter Interpublic, le numéro quatre.
Les deux entreprises ont ensuite officialisé, lundi après-midi, leurs fiançailles dans un communiqué. Leurs conseils d'administration respectifs ont approuvé l'opération qui prendra la forme d'un rachat d'Interpublic par Omnicom entièrement financé en actions.
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Les actionnaires d'Interpublic recevront chacun 0,344 actions Omnicom pour une action Interpublic détenue. Les actionnaires d'Omnicom détiendront 60,6% du nouvel ensemble, ceux d'Interpublic 39,4%.
Sur la base du cours de clôture Omnicom de vendredi (103,42 dollars), ces termes impliquent une offre de rachat sur une base de 35,58 dollars par action Interpublic. Soit une prime de 21,6% par rapport au cours de vendredi (29,26 dollars) qui valorise à 13,3 milliards de dollars les fonds propres d'Interpublic.
Ce nouvel ensemble affichera des revenus de 26,5 milliards de dollars sur la base des résultats de 2023. Les synergies en rythme annuel qui seraient générées par ce rapprochement sont évaluées à 750 millions de dollars.
Ce rapprochement va ainsi créer le numéro un mondial du secteur en termes de revenus. "Sa force résiderait dans son leadership très marqué sur le marché 'media' aux États-Unis avec une part de marché que nous estimons autour de 40% contre 20% pour Publicis par exemple", a expliqué Oddo BHF dans une note publiée lundi. Les deux groupes s'attendent à ce que l'opération soit finalisée au second semestre 2025.
Les fiançailles rompues entre Omnicom et Publicis
À New York, l'action Omnicom perd 2,7% en préouverture ce lundi, tandis qu'Interpublic bondit de 13,48%.
À Paris, l'action Publicis réagit positivement à l'annonce, prenant 1,8% vers 14h30 après avoir gagné plus de 2,5% en début de séance. Il en est de même pour le britannique WPP qui s'adjuge 3,7% à la Bourse de Londres.
"Il y a tout d'abord une lecture croisée sur les valorisations. L'article du Wall Street Journal évoqu(ait) une valorisation pour Interpublic environ 25% supérieure à celle du marché donc cela peut avoir un impact positif sur les autres groupes publicitaires. Même si Interpublic souffre par rapport aux autres et affichent logiquement une décote", explique un intermédiaire financier.
Cet expert souligne surtout qu'un tel rapprochement pourrait bénéficier aux concurrents. Le secteur publicitaire n'a pas connu de réelle grande tentative de rapprochement depuis plus d'une décennie. En 2013, Omnicom et Publicis étaient entrés en négociations exclusives pour une fusion "entre égaux". Mais les fiançailles avaient été rompues un an plus tard.
"Le vrai sujet a été le fait que dans l'évolution de la discussion avec nos amis d'Omnicom (...) nous étions en désaccord sur la conception du projet à l'arrivée, alors qu'au départ nous étions parfaitement d'accord", avait expliqué à l'époque sur BFM Business Maurice Lévy, alors président du directoire de Publicis.
"Celui qu'ils ont voulu appliquer à la fin était un non-modèle", avait-il poursuivi évoquant "une commission de synthèse d'un parti socialiste introuvable". "On peut dire tout simplement que la fusion entre égaux pouvaient se traduire par une absorption de Publicis par Omnicom", avait-il simplifié.
Dix ans plus tard, une opération similaire survient donc. Or la précédente expérience entre Publicis et Omnicom "avait montré que les clients n'étaient pas forcément friands de ce genre d'opération qui complexifie les structures alors qu'ils préfèrent au contraire une simplification" souligne l'expert anonyme précédemment cité.
Pertes de clients?
Ces opérations à grande échelle "peuvent constituer une importante distraction pour les groupes concernés qui mettent en place des comités d'intégration", poursuit-il. "Cela ouvre la voie à des gains de part de marché à court terme pour les concurrents. Avec des clients qui peuvent quitter l'un des groupes: imaginons par exemple qu'un d'entre eux a Coca comme client et l'autre Pepsi", a-t-il conclu.
Ce constat est partagé par Oddo BHF dans sa note publiée ce lundi. "Cette opération nous semble positive pour l’ensemble du marché des agences de publicité (et possiblement encore plus pour les concurrents non concernés)", écrit le courtier.
"Cette opération va permettre une concentration accrue des parts de marché, tout particulièrement dans le domaine 'media' aux États-Unis où les effets d’échelle sont les plus importants. Le nouveau groupe serait largement leader avec une part de marché de l’ordre de 40% sur ce marché mais surtout la dimension oligopolistique du marché serait renforcée avec plus que 5 grands acteurs mondiaux (contre 6)", explique dans un premier temps Oddo BHF.
"Cette réduction de la concurrence serait naturellement positive pour cette industrie avec à la clef une capacité à augmenter les prix et une moindre concurrence sur les recrutements ("talents")", poursuit le courtier.
Voilà pour l'aspect lié à la consolidation du secteur. Mais cela n'est pas la seule dimension dont il faut tenir compte. Oddo BHF souligne que le nouveau groupe créé par le rapprochement entre Omnicom et Interpublic devrait" gérer un risque de perte de clients et de talents qui pourraient profiter à ses concurrents, et tout particulièrement Publicis qui est le groupe le plus exposé aux États-Unis". Ce alors qu'Omnicom "n'a jamais démontré sa capacité à gérer des opérations importantes", note au passage le courtier.
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