(BFM Bourse) - L'équipementier automobile a abaissé ses objectifs pour 2024, invoquant notamment des incertitudes liées à l'électrification et à la régulation. Mais le marché s'attendait à pire.

Passer un avertissement sur résultats et progresser en Bourse. C'est a priori difficile voire impossible. Mais cela peut arriver.

L'équipementier automobile Forvia le démontre ce vendredi. L'ex-filiale de Peugeot SA a abaissé ses perspectives pour 2024, et, pourtant, son action décolle de 9,7% vers 15h30.

Malmené depuis plusieurs trimestres par un marché qui a mis au rebut le compartiment automobile et les équipementiers particulièrement, Forvia a abaissé plusieurs cibles.

Le groupe vise 26,8 milliards d'euros à 27,2 milliards d'euros de ventes pour 2024, contre 27,5 milliards à 28,5 milliards d'euros précédemment, une marge opérationnelle de 5% à 5,3%, contre un chiffre situé "dans le bas" d'un intervalle de 5,6% à 6,4% auparavant, et un flux de trésorerie net d'au moins 550 millions d'euros contre au moins 649 millions d'euros précédemment.

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Incertitudes réglementaires

Par ailleurs, la société a indiqué anticiper un ratio de levier d'endettement (dette nette rapportée au résultat d'exploitation brut ajusté) de 2 maximum à fin 2024, contre 1,9 maximum précédemment. L'entreprise a cependant maintenu inchangée sa cible d'endettement à fin 2025 à moins de 1,5.

Forvia invoque plusieurs éléments pour justifier cet abaissement de perspectives, notamment une "plus grande prudence" sur les ventes de fin d'année.

L'équipementier mentionne les incertitudes liées à "la poursuite du ralentissement de l'électrification" et les inquiétudes dues à la mise en œuvre de la réglementation européenne CAFE ("Corporate average fuel economy").

Cette réglementation impose aux constructeurs automobiles, en Europe, à réduire, en moyenne, leurs émissions de Co2 à 95 grammes par kilomètre. "Ce qui représenterait une baisse de 15% par rapport à 2021 et nécessiterait une forte hausse des ventes de véhicules électriques qui est loin d’être évidente aujourd’hui malgré les progrès à venir sur l’offre", expliquait la semaine dernière à BFM Bourse Michael Foundoukidis, analyste chez Oddo BHF.

Forvia évoque également "des niveaux élevés de stocks en Amérique du Nord" qui entraînent des annonces de fermetures d'usines et des réductions de prévisions de production pour le second semestre, ainsi que des risques croissants de grève.

En outre, l'équipementier est pénalisé par des retard de mises en production, notamment en Chine, ainsi que par des effets de changes défavorables, avec un impact de 500 millions d'euros estimé au second semestre.

Face à cet environnement qui se dégrade, Forvia a annoncé le lancement d'une initiative "West to east" destiné à renforcer ses relations avec les constructeurs chinois, ainsi que l'accélération du plan "EU-Forward".

Ce plan prévoit 10.000 suppressions de postes dans les cinq prochaines années avec des économies de 500 millions d'euros attendues. Le groupe a précisé ce vendredi que 90% des réductions prévues pourraient être effectives à l'horizon 2027. Un impact positif de ce plan d'environ 180 millions d'euros est anticipé en 2025.

Un objectif de désendettement confirmé

La société a par ailleurs revu son objectif de synergies de coûts tirées de l'intégration de l'allemand Hella (racheté en 2022 par Faurecia, ce qui avait donné naissance à Forvia) à 400 millions d'euros en année pleine en 2025, contre 350 millions d'euros précédemment.

In fine, l'ensemble de ces annonces sont bien prises par le marché. "Vu la chute du cours (-53% depuis le début de l'année), et les avertissements sur résultats du secteur des dernières semaines, beaucoup de choses était déjà intégrées dans le prix de l'action. Au final, l'abaissement des perspectives n'est pas aussi violent que le redoutait les 'bear' (les investisseurs qui misent sur la baisse de l'action)", explique un analyste.

"Le marché est actuellement en phase haussière de toute façon. Par ailleurs, Forvia n'a pas annoncé d'augmentation de capital, ce qui peut rassurer", poursuit-il.

Bernstein dresse un constat assez similaire. "Avec les avertissements successifs d'un certain nombre de ses clients constructeurs, qu'il s'agisse d'abaissements explicites des prévisions pour le deuxième semestre de l'année 2024 ou de commentaires généraux sur les conditions difficiles de l'industrie, confirmés par les réductions successives de S&P dans leurs prévisions de production automobile mondiale, ce n'était qu'une question de temps avant que les équipementiers tels que Forvia ne doivent recalibrer leurs propres attentes", explique le bureau d'études.

Toutefois Bernstein estime que l'annonce n'est pas si catastrophique. La note de l'intermédiaire financier s'intitule d'ailleurs "alors ce n'était pas si mal, n'est-ce pas ?".

Dans la mesure où la société est endettée, "la confirmation que son objectif clé de désendettement, à savoir un ratio dette nette/Ebitda ajusté inférieur à 1,5 à la fin de 2025, reste inchangé, soutenu par le programme de cession en cours, a été un point très rassurant", ajoute le bureau d'études.