(BFM Bourse) - Le groupe minier dévisse à la Bourse de Paris après avoir abaissé ses objectifs annuels de production de manganèse au Gabon et de nickel en Indonésie, en amont de sa publication trimestrielle prévue le 24 octobre.
La saison des publications d'entreprises à Paris vient officiellement de débuter avec plusieurs déceptions. Le géant du luxe LVMH plonge à la Bourse de Paris après avoir livré une activité décevante au titre du troisième trimestre, dans un contexte de ralentissement marqué de la demande en Chine.
C'est également la situation économique en Chine qui a amené Eramet à passer un avertissement. En amont de sa publication trimestrielle prévue la semaine prochaine, le groupe minier a pris les devants et a été contraint de réviser ses objectifs annuels de production de manganèse au Gabon et de nickel en Indonésie.
A la Bourse de Paris, Eramet est sous pression après ces ajustements. Le titre plonge de 17,36%, à 58 euros vers 10h10 et accuse la plus forte baisse du marché parisien. D'après Reuters, il s'agit aussi de son plus fort repli journalier depuis le 30 août 2023.
Un contexte de marché dégradé
Eramet justifie cet ajustement par des conditions de marché particulièrement dégradées de l’acier carbone en Chine, et par la délivrance cette semaine, par les autorités indonésiennes d’un permis de vente de minerai de nickel "inférieur aux attentes".
Concernant le manganèse, le groupe minier français dit rencontrer un "fort recul de la production d'acier au carbone en Chine cet été" qui "a entraîné une nette baisse des achats de minerai par les producteurs chinois d'alliages de manganèse".
Dans ce contexte, Eramet a jugé pertinent de suspendre la production de minerai de sa mine gabonaise de Moanda pendant au moins trois semaines. Le groupe minier ajoute que les ventes et les expéditions "se poursuivront pendant cette période", et que la durée de cette interruption sera ajustée "en fonction de l'évolution du marché".
"Cette décision reflète un déséquilibre prononcé entre d’un côté une demande en berne en provenance du secteur chinois de l’acier et de l’autre une offre pléthorique suite à l’explosion des prix pendant l’été. Malgré l’annonce d’un puissant plan de relance par les autorités chinoises, les prix du minerai haute teneur ont poursuivi en octobre leur chute, en baisse de 20% sur septembre et de 55% sur les records de juillet", expliquent les analystes d'Oddo BHF.
En conséquence, Eramet révise à la baisse les volumes de ventes de minerai de manganèse et s'attend à produire entre 6,5 à 7 millions de tonnes de manganèse en 2024, contre 7 à 7,5 millions précédemment.
"Dans ce contexte, la décision d’Eramet nous semble faire sens et elle devrait, combinée à l’absence du principal autre acteur du minerai haute teneur Gemco jusqu’à la fin du premier trimestre 2025, entraîner un rebond des prix", poursuit le bureau d'études.
Des problèmes administratifs en Indonésie
Pour le nickel, le groupe minier ajuste aussi ses ambitions, mais pour cette fois-ci pour des raisons administratives. Rappelons qu'Eramet possède une coentreprise aux côtés de Tsingshan (43% pour le groupe français et 57% par la société chinoise) qui exploite la plus grande mine de nickel au monde à Weda Bay en Indonésie.
En raison des difficultés à obtenir ces autorisations pour augmenter son activité, Eramet a révisé à la baisse sa prévision de ventes de minerai de nickel, à 29 millions de tonnes humides contre une fourchette de 40 à 42 millions de tonnes humides précédemment. Cette annonce est "plus inattendue", signale Oddo BHF, dans la mesure où "le groupe avait déjà abaissé en juillet son objectif dans le bas de la fourchette initiale de 40-50 millions de tonnes humides", rappellent les analystes.
La décision des autorités indonésiennes pourrait selon le bureau d'études "traduire la volonté de l’Indonésie de freiner la croissance débridée de la production minière face aux risques d’épuisement des ressources et de pollution".
Le groupe minier assure cependant que la baisse d'activité de sa filiale Weda Bay "devrait être largement compensé par une augmentation significative des primes sur le minerai, conséquence de la limitation de l'offre domestique."
Eramet et son partenaire Tsingshan prennent "acte de cette limitation de volumes" et prévoient de demander une révision du permis d'exploitation pour 2025 et 2026 afin "d'augmenter progressivement" la production. Le groupe table toujours sur une hausse des ventes à 60 millions de tonnes humides à moyen terme. "Par prudence", Oddo BHF préfère réviser à la baisse ses hypothèses de volumes sur Weda Bay au-delà de 2024.
Ces annonces sèment le doute sur la capacité d'Eramet à tenir l'ensemble de ses objectifs financiers pour l'année 2024. Fin juillet, le groupe minier avait assuré anticiper une amélioration de ses performances financières au second semestre "grâce à une remontée des prix", après avoir essuyé sa première perte semestrielle depuis 2020. Le groupe avait même nettement relevé son objectif de résultat brut d'exploitation, désormais attendu entre 1,2 et 1,3 milliard d'euros en 2024. Verdict, le jeudi 24 octobre donc.
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