(BFM Bourse) - Edenred fera son entrée dans l'élite de la Bourse de Paris le 19 juin alors que Vivendi en sera évincé. La capitalisation, les volumes échangés sont les principaux critères justifiant des changements au sein de l'indice. Mais la décision d'intégrer ou de sortir une société cotée du CAC 40 reste en partie à la discrétion d'un comité indépendant.
Comme à chaque trimestre, Euronext fait le ménage dans ses indices. L’opérateur boursier a annoncé jeudi soir le résultat de sa revue trimestrielle sur les indices de la Bourse de Paris. Et pour la première fois depuis septembre 2021, le CAC 40 compte un nouveau pensionnaire.
Euronext a annoncé qu'Edenred rejoindrait l'indice vedette parisien à compter du 19 juin prochain.
Avec un beau parcours boursier - la valeur a pris 19% depuis le 1er janvier et 165% sur 10 ans - le spécialiste des solutions de paiements dans le monde de l'entreprise, connu du grand public pour sa marque Ticket Restaurant, tapait depuis plusieurs trimestres à la porte du CAC 40...
Et cette nouvelle arrivée signifie le départ d'une star déchue. Il s'agit de Vivendi qui cède son fauteuil de pensionnaire du CAC 40 au profit de l'ancienne filiale d'Accor. Cette éviction de Vivendi sonne comme un véritable coup de tonnerre. Le géant des médias quitte le Saint des saints alors qu'il était un des pensionnaires de l'indice parisien l'entrée en vigueur de l'indice, en 1988. La société évoluait alors sous le nom de Compagnie Générale des Eaux .
Mais le groupe n'avait plus beaucoup d'arguments à faire valoir pour rester dans l'élite boursière. Sa valorisation, une des plus faibles du CAC 40 (9 milliards d'euros) et un flottant limité par la part d'un peu moins de 30% de Groupe Bolloré, ne plaidaient pas en sa faveur pour un maintien dans le CAC 40. "La décision d'Euronext est technique et ne remet pas en cause les fondamentaux de Vivendi", a déclaré à l'AFP le directeur de la communication du groupe, Jean-Louis Erneux.
En septembre 2021, Atos a connu pareille mésaventure. L'entreprise de services informatiques avait alors dû céder sa place au profit d'Eurofins Scientific qui avait vu son activité s'envoler pendant la crise du Covid.
Un comité indépendant qui cultive la discrétion
Mais comment une société entre-t-elle ou sort-elle de l'indice phare? Sur quels critères? C'est pour répondre à cette question que se réunissent au moins chaque trimestre les 7 membres (régulateurs, professeurs, analystes, etc.) du Conseil scientifique des indices (CSI) de la Bourse de Paris. Ce comité indépendant cultive la discrétion. D'ailleurs on ne connaît pas les noms de ces membres, afin d'éviter qu'ils soient sollicités à l’approche des révisions et pour garantir une sérénité dans le processus de décision. Initialement, les dates des réunions n'étaient même pas connues à l'avance. Depuis quelques années, elles sont (discrètement) indiquées d'un trimestre à l'autre. Le CSI est donc le seul décideur de la composition des principaux indices de la Bourse de Paris, notamment du CAC 40. Chacun des membres dispose d'une seule voix, tandis que l'opérateur du marché Euronext n'a pas voix au chapitre.
Pour que la composition de l'indice phare de la Bourse de Paris soit modifiée, "il faut qu'il y ait une conviction assez forte sur le fait que les écarts de classement entre les valeurs soient significatifs et pérennes", indiquait ainsi un membre de ce comité aux Échos en 2013. "Il ne faut pas que ce soit un simple accident statistique", ajoutait un autre. Il arrive donc régulièrement que le comité décide de ne pas remanier l'indice phare, comme ce fut le cas entre septembre 2021 et la dernière réunion qui a consacré l'entrée d'Edenred.
Valorisation boursière, part du flottant, titres "liquides"...
Si l'intégration d'une valeur dans le Saint des saints est à l'entière discrétion du CSI, ce dernier s'appuie néanmoins sur un certain nombre de critères stricts et précis. Le premier d'entre eux est logiquement la valorisation boursière des groupes cotés à Paris. Les valeurs éligibles doivent nécessairement figurer parmi les 100 premières capitalisations boursières. Outre la valorisation boursière, les volumes d'échanges de titres constituent un autre critère essentiel, le CAC 40 se devant de représenter des valeurs "liquides", pour lesquelles il est aisé de trouver une contrepartie à l'achat ou à la vente.
Le CSI prend également en compte, depuis 2013, la part du flottant dans le capital, à savoir la part du capital effectivement disponible sur le marché. En 2015, EDF avait ainsi été exclu du CAC 40 car l'État français détenait 84,5% de son capital. Et dans le cas de Vivendi, c'est ce critère qui a grandement pesé dans la balance.
Le géant des médias, dont la capitalisation dépassait les 9 milliards d'euros au moment de la décision, est pénalisé par un flottant limité par la part d'un peu moins de 30% de Groupe Bollore. Seuls le géant des centres commerciaux Unibail-Rodamco-Westfield (6,4 milliards d'euros), et Teleperformance (6,9 milliards d'euros), ont une capitalisation plus faible que Vivendi.
Selon des experts au fait des agissements du CSI, des considérations géographiques ou sectorielles ont également pu intervenir pour certaines valeurs au coude-à-coude. Noël Amenc, professeur à l'Edhec, avait ainsi claqué la porte du CSI, fin 2012, critiquant l'entrée du belge Solvay dans le CAC 40 (en lieu et place du constructeur automobile PSA Peugeot Citroën), en raison de la nationalité du chimiste. "Il y a de nombreuses règles précises qui ont des conséquences contradictoires pour la composition de l'indice, et on laisse le choix aux membres du CSI d'appliquer telle ou telle règle sur une base purement discrétionnaire. Il faudrait que l'application des règles soit claire, transparente et systématique", expliquait-il alors aux Échos. Si ce n'est pas le cas, il estime qu'un doute plane dès lors "sur l'objectivité et l'absence de conflits d'intérêts, un élément essentiel de la crédibilité d'un indice".
Sur son site, Euronext explique que les deux critères principaux sont le capital flottant et le montant des capitaux échangés sur l’année écoulée. L'opérateur boursier les combine pour faire une moyenne et fournit ensuite un classement des sociétés cotées au Comité scientifique des indices chaque trimestre. C’est là que ça se corse car le CSI ne va pas forcément sélectionner les 40 premières sociétés au classement combiné, car il existe une forme de priorité aux “anciens” pour éviter un turnover trop important. L'"Index Summary" défini par Euronext explique ainsi que "les 35 entreprises les mieux classées (selon la combinaison des deux critères sus-cités) sont sélectionnées. Une "zone tampon", où les valeurs actuellement dans l'indice ont la priorité sur les entreprises qui n'en font pas partie, est composée des entreprises classées entre la 36e et la 45e place". C'est au sein de ce panel de 10 groupes que le CSI choisit, en priorité, une valeur à intégrer au CAC. Inversement, une autre valeur devra alors sortir de l'indice.
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