(BFM Bourse) - Connu pour ses campagnes contre Scor ou Club Med, ce fonds conteste vivement les conditions de cession de Tech Foundations à Daniel Kretinsky et demande l'abandon de cette vente.
La "transformation d'Atos" est loin de suivre un long fleuve tranquille. L'entreprise de services numériques a décidé début août de céder son périmètre historique ("Tech Foundations"), qui rassemble notamment les activités d'infogérance en fort déclin, à l'homme d'affaires tchèque Daniel Kretinsky.
Cette transaction s'opérera, selon Atos, sur la base d'une valeur d'entreprise de 2 milliards d'euros, incluant un apport en trésorerie de 100 millions d'euros et des reprises de passifs au bilan de 1,9 milliard d'euros.
Avec cette vente, Atos restera coté et changera de nom pour devenir Eviden, se recentrant sur ses activités en croissance (cybersécurité, transformation numérique, big data etc…). Ce qui a marqué un virage à 180 degrés par rapport au plan initial du groupe qui était d'introduire en Bourse Eviden.
De plus, l'accord avec Daniel Kretinsky, prévoit que ce dernier participera à hauteur de 180 millions d'euros à une augmentation de capital de 900 millions d'euros d'Eviden. Cette annonce a forcément grippé le marché, puisqu'Atos pèse actuellement en Bourse environ 785 millions d'euros. "Sachant que 80% de cette levée se fera à un prix non figé à ce stade, le risque de dilution massive est grand et augmentera au fur et à mesure de la baisse du titre. L’opération n’étant prévue que fin 2023-début 2024, le temps joue contre les actionnaires", soulignait en août Invest Securities.
Atos doit soumettre ce plan global de transformation lors d'une assemblée générale qui doit être annoncée au quatrième trimestre.
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Une vague de contestations
Ce projet a suscité une vague de protestations, avec notamment la création d'une association baptisée UDAAC pour "union des actionnaires d'Atos en colère".
Et ce mercredi, un "hedge fund" français et non des moindres s'est invité dans la danse: CIAM. Ce fonds a mené tambour battant de nombreuses campagnes, notamment contre l'offre publique d'achat du Club Med en 2013-2014 ou le projet de fusion Fiat Chrysler – Renault (qui avait été abandonnée) en 2019. Mais sa campagne la plus célèbre a probablement été celle contre le réassureur Scor, CIAM contestant le refus du rapprochement avec Covéa et la rémunération du PDG de l'époque, Denis Kessler. Lors de l'assemblée générale de 2019 de Scor, la rémunération du patron de Scor avait d'ailleurs été approuvée de justesse par les actionnaires du groupe, à la suite de la campagne de CIAM, qui avait encore émis en mai des critiques contre la gouvernance de Scor.
Pour revenir à Atos, CIAM affirme dans un communiqué avoir envoyé au conseil d'administration du groupe ainsi qu'à l'Autorité des marchés financier (AMF) une lettre au vitriol sur le projet de transformation de la société, dénonçant les conditions de la cession de Tech Foundations à Daniel Kretinsky. CIAM demande ainsi l'abandon de ce projet de vente.
"La modification du plan de transformation décidée par le conseil d’administration afin de céder l’activité Tech Foundations à Monsieur Kretinsky est défavorable à la société et à ses actionnaires. Nous reconnaissons la nécessité d’une augmentation de capital pour financer la restructuration de Tech Foundations seulement si cette activité prometteuse demeure dans le périmètre des actifs sociaux", expliquent Catherine Berjal et Anne-Sophie d’Andlau, les dirigeantes de CIAM, dans le communiqué de presse. "Nous nous opposerons à la mise en œuvre de ce plan ainsi qu’à toute proposition qui conduirait à la dépossession des actionnaires d’Atos SE sans un juste partage de valeur", ajoutent-elles.
"Les conditions annoncées pour l’opération apparaissent trompeuses et omettent de préciser l’existence d’un prix de cession négatif", affirme par ailleurs CIAM. Selon Les Echos, le fonds n'envisage pas de s'allier à l'UDAAC.
Une lutte difficile à trancher
Contactée par BFM Bourse, une porte-parole d'Atos a indiqué que le groupe avait reçu la lettre de CIAM et n'a pas fait de commentaire supplémentaire. Le président du conseil d'administration d'Atos, Bertrand Meunier, qui 'est d'ailleurs mis en cause par CIAM, avait défendu lundi le plan de transformation d'Atos dans un entretien à La Tribune. Le dirigeant a notamment expliqué que l'offre de Daniel Kretinsky était la seule concrète pour Tech Foundations.
"Difficile de savoir si CIAM parviendra à faire bouger les lignes, car l'inconnue reste l'impact que le fonds aura sur les petits porteurs, qui sont désormais très présents sur Atos. Sycomore AM (une société d'investissement, NDLR) avait déjà mené une fronde mais sans un succès énorme", juge un analyste.
"Le problème aussi est que l'alternative qui consiste à conserver Tech Foundations n'est peut-être pas une si bonne idée, car si cette activité s'est récemment améliorée avec la nouvelle direction d'Atos, elle demeure très consommatrice de cash, avec une restructuration à mener. Tech Foundations peut rester une bombe à retardement", ajoute cet expert.
Quant au prix de cession négatif à Kretinsky avancé par CIAM, "on peut arriver à cette conclusion en prenant en compte le fait qu'Atos va normaliser le besoin en fonds de roulement de Tech Foundations et l'affacturage. Mais c'est oublier que les sorties de cash sur lesquelles Tech Foundations s'est engagé (fonds de pension retraite, indemnité de départs liées à la restructuration) et le reste des coûts de restructuration seront à la charge de Daniel Kretinsky", tranche-t-il.
En attendant l'évolution de cette joute, l'action Atos s'adjuge 1% ce mercredi à la Bourse de Paris à 7,068 euros vers 10h20.
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