(BFM Bourse) - Après avoir atteint en séance un nouveau plus haut annuel à plus de 5.670 points, la Bourse de Paris s'est retournée à la baisse jeudi après-midi, faute de franche surprise de la part de la BCE et au vu d'une entame de séance plus délicate que prévu à Wall Street qui attend une batterie de résultats de la part de vedettes des nouvelles technologies.
Un discours rôdé mais déjà intégré. Si Mario Draghi a bien pratiqué jeudi le langage que les investisseurs attendaient, la conférence de presse de la Banque Centrale Européenne n'a en somme fait que confirmer et préciser les grandes lignes de la politique à venir de l'institution, déjà assez clairement ébauchée le mois dernier lors du forum annuel des banquiers centraux à Sintra (Portugal). Faute d'effet de surprise, comme aurait pu l'être une baisse immédiate et significative du taux directeur, les indices boursiers marquent une certaine déception à l'image d'un recul de 0,71% du CAC 40 à 5565,93 points vers 16h00, soit 1,8% de recul par rapport au plus haut de la séance.
Il faut dire qu'au même moment Wall Street s'inscrivait en recul avec 0,3% de baisse pour le Dow Jones, plombé par une nouvelle chute de plus de 4% de Boeing (qui pèse de façon disproportionnée dans le calcul de l'indice historique) après l'annonce d'une lourde perte trimestrielle, d'un nouveau report de la mise en service du 737 MAX chez un important client et de problèmes de production sur le 787. En outre la nervosité règne sur le compartiment technologique, alors que la journée s'annonce riche en publications. Tesla flanche ainsi de près de 14% après ses comptes trimestriels, et Facebook sans connaître un sort comparable perd tout de même 1,25%. Après clôture, ce sont Amazon, Google et Intel qui publieront leurs résultats trimestriels.
Sept ans presque jour pour jour après le mémorable "whatever it takes", sa déclaration qui avait mis un terme à la spéculation contre la dette des États périphériques de la zone euro en 2012, Mario Draghi a tenu l'une de ses dernières conférences de presse en tant que président de la BCE, avant que Christine Lagarde -qu'il connaît de longue date et qui fera une remarquable présidente de la banque centrale, a-t-il assuré- ne lui succède en octobre.
S'il n'a pas procédé à une baisse de taux dès aujourd'hui, "Super Mario" a mis en place les conditions d'une refonte complète de son approche et de ses outils pour la prochaine (et dernière donc pour sa part) réunion de septembre. Alors que certains opérateurs espéraient qu'elle surprenne les marchés dès cette réunion de juillet, avec une baisse forte de ses taux directeurs, "la BCE a préféré prendre le temps de la réflexion sur l’ensemble de ses moyens d’action et pas uniquement le seul taux d’intérêt", détaille Patrice Gautry, chef économiste à l'UBP.
Changement en apparence subtil mais à ne pas négliger, l'institution considère désormais que son objectif d’inflation "symétrique" autour de 2% (et non plus proche de mais légèrement inférieur à 2%), ce qui signifie que la BCE va accepter des périodes de hausse et de baisse de l’inflation autour de 2% et ne plus commencer à remonter ses taux dès que l’inflation progresse et s’approche des 2%. C’est un changement de philosophie en ligne avec la même réflexion observée du côté de la Fed, note Patrice Gautry. Comme il a été indiqué que les taux ne remonteront pas avant la fin du premier semestre 2020 "avec la nouvelle lecture de l’objectif d’inflation, il est probable que la BCE puisse aussi abaisser ses taux encore plus si l‘inflation observée et anticipée baissait encore".
"Nous n'acceptons pas que le taux d'inflation reste faible en permanence", a martelé Draghi au cours d'une conférence, affirmant que la banque centrale combattrait cette faiblesse aussi vigoureusement qu'elle le ferait d'un excès d'inflation.
En même temps que les taux baisseront, la BCE devrait aussi présenter une réflexion sur les autres instruments de son action, y compris un nouveau programme de rachat d'actifs.
La BCE s’attelle ainsi à une réforme en profondeur de son action future, offrant un nouveau package de mesures monétaires, qui donneront encore plus de moyens à la future présidente.