Connexion
Mot de passe oublié Pas encore de compte ?

États-Unis, Royaume-Uni, France, Japon : Pourquoi les taux d'emprunt grimpent pour tous les pays

vendredi 10 janvier 2025 à 12h56
Les taux augmentent

(BFM Bourse) - Une forte poussée des rendements obligataires s'observe des deux côtés de l'Atlantique. La persistance de l'inflation provoque des craintes en zone euro et aux États-Unis tandis que les doutes sur la soutenabilité des finances publiques inquiètent au Royaume-Uni.

C'est une tendance qui se dessine depuis décembre et qui s'est même accélérée en ce début d'année: les rendements obligataires connaissent une poussée de fièvre.

"Une des dynamiques les plus puissantes depuis un mois est la montée quasi ininterrompue des taux à long terme, notamment des deux côtés de l’Atlantique", a remarqué mercredi Sebastian Paris Horvitz de LBPAM.

En un peu plus d'un mois, le taux du titre de dette à 10 ans des États-Unis est passé d'environ 4,18% à 4,7% actuellement sur le marché secondaire (là où les investisseurs s'échangent entre eux les titres). Le taux à même échéance pour l'Allemagne s'inscrit à 2,564% actuellement, contre 2,09% fin novembre.

Du côté de la France, le rendement de l'obligation assimilable du Trésor (OAT) à 10 ans évolue à 3,411% contre 2,9% fin novembre. La hausse est encore plus importante du côté du Royaume-Uni, où le taux sur le "Gilt" à 10 ans s'établit à 4,85% contre 4,24%, novembre.

Le mouvement de hausse des rendements obligataires s'avère donc généralisé des deux côtés de l'Atlantique.

>> Accédez à nos analyses graphiques exclusives, et entrez dans la confidence du Portefeuille Trading

La Fed change la donne

Cet envol des taux prend notamment ses racines dans l'issue de la dernière réunion de la Réserve fédérale américaine (Fed). Les membres de la banque centrale et notamment son président, Jerome Powell, avaient alors souligné que davantage d'efforts devaient être accomplis sur la baisse de l'inflation pour poursuivre les réductions de taux directeurs.

Les "minutes" (compte-rendu) de cette réunion, publiées mercredi soir, ont d'ailleurs indiqué que les membres de la Fed redoutaient une résurgence de l'inflation, note Ricardo Evangelista d'Activtrades.

Dans une note publiée ce vendredi 10 janvier, UBS souligne que la hausse des rendements américains a été due à une conjonction de facteurs, à savoir le ton plus restrictif de la Fed depuis la dernière réunion, mais aussi les robustes statistiques américaines, qui rendent moins pertinentes des baisses de taux.

Les interrogations sur la politique économique de Donald Trump, perçue comme inflationniste, peuvent également jouer. Même si ce facteur occupe l'esprit du marché depuis maintenant octobre, lorsque les investisseurs avaient commencé à miser (à raison) sur la victoire du candidat républicains lors de l'élection présidentielle.

Un peu de tension peut aussi survenir du côté des émissions de dette américaine. "Il y a un énorme volume de dette sur le marché", a déclaré Gregory Peters, co-responsable des investissements chez PGIM Fixed Income, sur Bloomberg TV. "L'offre ne cesse de croître. Si l'on ajoute à cela le fait que l'inflation est peut-être un peu plus stable ou qu'elle s'inverse, la pression sur les marchés obligataires s'accroît", a-t-il ajouté.

L'inflation persiste en zone euro

La poussée en forme de "rampe" de taux américains depuis décembre "s'est totalement répliquée sur les rendements de la zone euro, alors que ce n'était pas le cas auparavant", souligne Alexandre Baradez, chef de l'analyse de marché chez IG France.

UBS dresse le même constat, notant que le Bund (l'obligation à 10 ans) de l'Allemagne a suivi le même chemin que les taux d'emprunt américains. "Les taux à long terme se sont nettement tendus depuis le début de l’année en Europe, en partie dus à la hausse des taux aux Etats-Unis", abonde Sebastian Pariz Hovitz de LBPAM.

Ce car le risque inflationniste aux États-Unis rappelle que la lutte contre l'inflation n'est pas non plus gagnée dans la zone euro. "Les membres de la Fed s'inquiètent de la persistance de l'inflation aux États-Unis. Mais le fait est que l'inflation sous-jacente aux États-Unis est au même niveau qu'en zone euro autour de 2,7%-2,8% et qu'il y a peu de progrès (sur une réduction, NDLR) depuis plusieurs mois", remarque Alexandre Baradez.

Les derniers chiffres d'inflation en zone euro publiés cette semaine le montrent bien. À 2,7% l'inflation sous-jacente dans l'union monétaire en décembre est restée inchangée depuis quatre mois consécutifs, note Barclays.

Le problème de cette inflation persistante est qu'elle donne moins de champ à la Banque centrale européenne (BCE) pour réduire ses taux, quand bien même l'activité est moins dynamique en zone euro qu'aux États-Unis.

"La rigidité persistante de l'inflation des services dans la zone euro signifie que la BCE devrait continuer à réduire lentement ses taux d'intérêt, même si les perspectives économiques restent médiocres", pointait mardi Capital Economics.

À noter que dans ce contexte de remontée des taux, la dernière adjudication de dette à moyen-long terme de la France s'est bien passée, jeudi. La demande a ainsi largement excédé l'offre de dette réalisée par l'Agence France Trésor, la dépassant de 2 à 3 fois selon les titres proposés.

Le Royaume-Uni inquiète sérieusement

Le cas du Royaume-Uni est plus singulier et plus inquiétant. Les risques inflationnistes aussi poussent les rendements des obligations vers le haut. Mais contrairement à la zone euro, des craintes sur la dette apparaissent en raison de la politique économique du gouvernement travailliste.

"La faiblesse de la livre sterling et du marché des gilts (obligations souveraines britanniques, NDLR) semble être la conséquence inévitable d'un budget mal accueilli", souligne Matthew Amis, d'abrdn.

"Nous pensons que madame Reeves (Rachel Reeves, la chancelière de l'Échiquier, équivalent du ministre des Finances, NDLR) aura enfreint ses propres règles budgétaires nouvellement élaborées lorsque l'OBR (un organe indépendant d'évaluation des finances publiques, NDLR) présentera ses prévisions actualisées à la fin du mois de mars", ajoute-t-il.

La livre a d'ailleurs chuté alors que les taux britanniques s'envolent. Une réaction de marché totalement à contre-courant des habitudes (normalement des taux plus haut soutiennent une monnaie, toute chose égale par ailleurs). Ce qui montre une défiance du marché vis-à-vis de l'économie britannique.

"Il est probable que le gouvernement sera obligé de réagir pour calmer le marché. Aussi, ceci risque de rendre encore plus prudente la Banque centrale, avec des pressions inflationnistes exacerbées par la baisse de la monnaie", note Sebastian Paris Horvitz, de LBPAM. Ce dernier fait valoir que le gouvernement travailliste avait précédemment adopté un budget "laxiste" et redoute que le Royaume-Uni tombe dans une "spirale défavorable" avec la hausse des coûts de la dette.

À noter que les rendements montent également au Japon mais bien plus progressivement et à des niveaux plus faibles. Le titre de dette à 10 ans du pays affiche un taux de 1,212% évoluant sur des plus haut depuis 2011. Ce qui est dû au fait que le pays est désormais sorti de la très longue période désinflationniste qu'il a connue pendant des années. Ce qui devrait pousser la Banque du Japon à monter ses taux.

"Compte tenu de la faiblesse persistante du yen, de la solidité de l'inflation et de l'ampleur des hausses de salaires dans un contexte de pénurie de main-d'œuvre (notre prévision pour les négociations salariales du printemps de cette année est de 5 %), la trajectoire de la Banque du Japon en matière de relèvement des taux reste intacte", explique Barclays.

Julien Marion - ©2025 BFM Bourse
Forum suspendu temporairement
Portefeuille Trading
+336.70 % vs +57.27 % pour le CAC 40
Performance depuis le 28 mai 2008

Newsletter bfm bourse

Recevez gratuitement chaque matin la valeur du jour