(BFM Bourse) - Après plusieurs années de plébiscite par les marchés boursiers, l’intérêt des investisseurs pour les SPAC a pris du plomb dans l'aile dans un contexte d’aversion au risque. Un projet bien ficelé en amont pourrait toutefois redonner de l'allant à un marché bien chancelant.
Avec la hausse des taux d'intérêt, le resserrement des conditions de crédit, l'euphorie autour des SPAC - ces véhicules d'investissement qui lèvent des fonds en Bourse en vue d'acquérir une société (sans qu'on sache à ce stade laquelle) et de fusionner avec - est retombée comme un soufflé. Les investisseurs ont également tourné le dos à ces sociétés blanc-seing (ou "chèques en blanc") devant un durcissement réglementaire, qui les rendrait moins attractives. En mars 2022, le régulateur américain des marchés, la SEC, a dévoilé une série de nouvelles règles qui vont imposer davantage de transparence aux SPAC, dont l'opacité a souvent été critiquée.
Comme les SPAC n'ont pas d'opérations antérieures ni d'états financiers à faire examiner, leur réussite dépend essentiellement de la réputation des personnes en charge de l'opération. Ce sont donc autant de facteurs qui ont conduit au dégonflement d’une bulle spéculative. Certaines sociétés ont même été contraintes de jeter l'éponge à l'image de Sports & Health Tech Acquisition Corp, la SPAC promue par le golfeur professionnel Tiger Woods, qui a abandonné mercredi dernier son projet d'introduction en Bourse de 150 millions de dollars.
Cette société "chèque en blanc" a demandé à retirer son enregistrement pour son projet d'introduction en Bourse mercredi auprès du gendarme boursier américain. L'an dernier, elle déclarait cibler les entreprises évoluant dans le secteur des technologies du sport ou de la santé avec une valeur d'entreprise de 600 millions à 1 milliard de dollars.
Un nombre important de liquidations
"Après un succès phénoménal en 2021, notamment aux Etats-Unis, où plus de 160 milliards de dollars ont été levés, 2022 a affiché de mauvaises performances boursières et un nombre important de liquidations faute de projet d’acquisition validés dans les délais, réduisant l’intérêt des investisseurs pour les SPAC", explique de son côté Thomas Hornus associé chez EuroLand Corporate.
Cet état de fait remet en cause toute l'essence même de l'existence d'une SPAC. Ces sociétés bien particulières disposent en effet d'un temps donné pour se prononcer sur une opportunité d'acquisition, qui doit être approuvée par l'assemblée des actionnaires ou le conseil d’administration de la SPAC. "Si le projet est refusé, les sponsors poursuivent leur recherche dans le délai de 24 mois. Si l’opération est réalisée dans ce délai, la SPAC devient une société cotée comme une autre. A défaut de réalisation de l’opération, la SPAC est liquidée" rappelle Thomas Hornus.
D'ailleurs, les SPAC cotées en France sur le marché réglementé d’Euronext "s’adressent principalement aux investisseurs qualifiés qui disposent des connaissances nécessaires pour évaluer le montage proposé" ajoute le spécialiste.

"La plupart des SPAC cotées en Bourse qui ont réalisé des opérations ont pour la plupart disparu, l'indice De-SPAC, un panier d'anciennes sociétés chèques en blanc cotées en Bourse, ayant chuté de 67% l'année dernière" rappelle de son côté Bloomberg. Et selon les données compilées par Barchart, plus d'une dizaine d'entreprises issues d'une fusion avec une SPAC ont ainsi perdu au moins 80% de leur valeur en Bourse depuis leurs sommets.
Pour Thomas Hornus, le marché des SPAC pourrait redevenir attrayant à condition de redonner confiance aux investisseurs en "réalisant leur IPO (introduction en Bourse, NDLR) sur une valorisation cohérente avec leur projet" mais aussi en "identifiant plus en amont les potentielles cibles à acquérir". La dernière condition pour restaurer la confiance des investisseurs est que ces SPAC payent, la ou les cibles visée(s) au "juste prix".