(BFM Bourse) - Le groupe au bibendum a généré un cash nettement supérieur aux attentes, ce qui lui a permis d'annoncer un programme de rachats d'actions d'un maximum 1 milliard d'euros sur la période 2024-2026.
Première publication de la semaine du côté du CAC 40, Michelin a bien répondu à l'appel du marché. Le groupe au bibendum a livré lundi soir ses résultats annuels après la clôture de la Bourse parisienne. Ces comptes ont largement satisfait les investisseurs.
Vers 10h45, l'action de la société en commandite par actions bondit de 6,6% et signe la plus forte progression d'un CAC 40 atone (-0,16%).
Michelin avait déçu en 2022 sur sa génération de cash. La société clermontoise avait brûlé alors 180 millions d'euros de trésorerie.
L'exercice 2023 s'annonçait toutefois bien meilleur pour cet indicateur clef. "Nous avions soutenu, dès le début, que 2023 devrait être une année génératrice de trésorerie, et ce de manière assez disproportionnée par rapport à la norme du groupe, après une année 2022 faiblarde (avec une légère consommation de trésorerie", rappelle sur ce point Stifel.
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La génération de trésorerie dépasse les attentes
Michelin avait indiqué viser un flux de trésorerie libre avant acquisitions de plus de 2,3 milliards d'euros en 2023, contre un décaissement de 104 millions d'euros en 2022. De leur côté les analystes attendaient un peu mieux, tablant sur un cash-flow libre avant acquisitions de 2,6 milliards d'euros, selon un consensus cité par HSBC.
Au final, le bibendum a regonflé sa trésorerie plus vite que tout le monde l'attendait. Le flux de trésorerie libre avant acquisitions s'est inscrit à 3 milliards d'euros et le cash-flow libre à 2,34 milliards d'euros. "Le cash-flow n'a pas déçu", résume Stifel.
La génération de cash de Michelin a bénéficié d'une amélioration sensible (985 millions d'euros sur l'année) du besoin en fonds de roulement en raison surtout d'une baisse des stocks. Le groupe a aussi été soutenu par une contribution positive de ses coentreprises (205 millions d'euros), notamment TBC, une société de distribution de pneus aux Etats-Unis opérée conjointement avec le japonais Sumitomo.
L'amélioration de la génération de trésorerie de Michelin s'explique aussi par sa meilleure rentabilité, ce qui souligne la capacité du groupe à faire face au repli des volumes en montant en gamme.
Le résultat brut d'exploitation (Ebitda) des secteurs – une mesure alternative de la rentabilité mise en avant par Michelin – a progressé de 4,3% à 5,48 milliards d'euros. Or, c'est à partir de cette ligne du compte de résultat que le groupe calcule ensuite son cash-flow.
Plus largement, le résultat opérationnel des secteurs s'est établi à un record de 3,57 milliards d'euros en progression de 5,2% sur un an et supérieur de 4% aux attentes du consensus, note Stifel. La marge correspondante est passée de 11,9% en 2022 à 12,6%.
Un "mix-prix" positif
Michelin est parvenu à améliorer sa marge malgré des ventes en berne. Sur l'ensemble de 2023, elles ont reculé de 0,9% en données publiées et progressé de 2% en excluant les effets de changes négatifs.
Le fabricant de pneumatiques a subi un effet volume défavorables de 4,7% dû à des déstockages sur l'ensemble de ses activités. "Le contexte économique incertain et la forte hausse des taux d'intérêt ont en effet incité les distributeurs et les clients professionnels à fortement déstocker et à réduire leur niveau de stock normatif", explique Michelin.
Néanmoins la société a plus que compensé cet impact défavorable par un effet "prix/mix" positif, c'est-à-dire à la fois sa capacité à tirer les prix vers le haut et à orienter ses ventes vers des produits et des régions avec des tarifs plus élevés. "L’effet mix très positif (337 millions d'euros) reflète la priorité donnée à la marque Michelin aux offres à forte valeur ajoutée, ainsi qu’à la croissance des ventes en pneus tourisme 18 pouces et +", c'est-à-dire les gros pneus pour les automobiles ordinaires.
A noter que les ventes hors pneus (gastronomie, convoyeurs) ont progressé de 10%, apportant 0,5 point de croissance globale.
Cet effet prix-mix a également permis de rehausser le résultat opérationnel, avec un impact positif de 1,46 milliards d'euros sur l'année, éclipsant les effets défavorables, comme ceux provenant des volumes (-702 millions d'euros).
Ces résultats meilleurs que prévu couplés à une forte génération de cash permettent au groupe d'améliorer son retour à l'actionnaire. L'entreprise proposera un dividende de 1,35 euro par action, en hausse de 8% sur un an. Surtout, Michelin a annoncé un programme de rachats d'actions pour un maximum d'1 milliard d'euros pour la période 2024-2026.
"Bien que la répartition du montant sur trois ans ne soit pas un programme massif en soi, nous considérons clairement l'annonce comme positive et favorable à l'action du groupe", écrit Deutsche Bank.
Prudence sur 2024
Les perspectives du groupe, qualifiées de "prudentes" par Stifel, viennent toutefois un peu nuancer le tableau de cette publication autrement très bonne. Pour 2024, Michelin a indiqué tabler sur un résultat opérationnel des secteurs supérieur à 3,5 milliards d'euros hors effets de changes et sur un flux de trésorerie libre avant acquisitions de plus de 1,5 milliard d'euros. UBS note que les analystes anticipaient en moyenne, pour 2024, un résultat opérationnel des secteurs de 3,59 milliards d'euros et un flux de trésorerie avant acquisitions de 1,9 milliard d'euros.
Surtout, Michelin ne voit pas ses volumes de ventes de pneus se reprendre, tablant au mieux sur une stabilité et au pire sur une baisse de 2%. Ce qui constituerait une troisième année de baisse d'affilée.
"2024 est une année incertaine. Cette année 2024 nous préoccupe parce que le contexte incertain au niveau économique en Europe sera probablement difficile, aux Etats-Unis il (ce contexte, NDLR) n'est pas très clair tandis que l'Asie du Sud-Est ralentit, la Chine récupérant moins vite que prévu", a déclaré Florent Menegaux, président de la gérance de Michelin, sur BFM Business ce mardi. Lors d'une conférence avec des analystes, le dirigeant a également pointé des incertitudes liées aux élections générales en Inde.
"Michelin est aux prises avec un manque de croissance des volumes depuis des années. 2024 devrait être une année plus équilibrée (…) mais cela n'implique pas que les volumes globaux devraient augmenter car la macroéconomie n'aide pas du tout", explique Stifel. La banque note que l'activité des pneus pour camions est déjà revenue à son niveau de 2019 et redoute que le segment "consommateur" fasse preuve de "fatigue" car les prix ont augmenté de façon continue depuis 2017.
"Toute augmentation supplémentaire des prix continuerait probablement à se faire au détriment des volumes, selon nous. Nous ne disons pas que les volumes ne croîtront pas, nous rappelons simplement à nos lecteurs que cela échappe au contrôle du groupe. Par conséquent, nous avons donc du mal à identifier un argument en faveur d'un re-rating (une amélioration des multiples boursiers de l'action) à ce stade", assène Stifel.
"En ce qui concerne les perspectives, la direction a prévu une marge d'erreur et adopté une position conservatrice", appuie Deutsche Bank.
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