(BFM Bourse) - Le groupe de produits de beauté et de cosmétiques a publié des résultats sous les attentes. Comme au troisième trimestre, le groupe a été pénalisé par l'Asie, en raison du tour de vis que la Chine a effectué sur les "daigou", des revendeurs qui utilisent des moyens illégaux pour s'approvisionner.
En 2023, L'Oréal avait ravi les investisseurs, à tel point que son titre avait gagné 35% pour pointer au huitième rang du CAC 40. Le champion de la beauté affichait alors la meilleure performance parmi les "KOHL" (Kering, L'Oréal, Hermès, LVMH).
Or, l'exercice 2024 s'annonce plus compliqué pour L'Oréal. Et la dernière publication du groupe français confirme les difficultés du groupe rencontrés en Asie du Nord, une des plus importantes régions du groupe.
Sur les derniers mois de 2023, le propriétaire des marques Lancôme, Garnier ou encore Maybelline a accusé dans la région une baisse marquante de son activité, de 6,2% en données comparables, alors que le consensus cité par Royal Bank of Canada (RBC) attendait une croissance modeste, mais positive de 0,4%. L'écart est donc significatif avec les projections des analystes.
L'Asie du Nord, point noir de la publication
Comme au troisième trimestre, le groupe a une nouvelle fois pâti en Asie d'une contre-performance du "travel retail" en raison du tour de vis que la Chine a effectué sur les "daigou", ces revendeurs sur le marché gris, à Hainan.
Comme l'explique le bureau d'études indépendant AlphaValue sur son blog, le mot "daigou" est un terme chinois qui désigne "des individus ou des groupes d'exportateurs en dehors de la Chine qui achètent des marchandises pour des clients chinois par des moyens illégaux".
Le cabinet de conseil Daxue Consulting détaille dans un post leur fonctionnement: les daigou s'approvisionnent à l'étranger, dans par exemple des duty free (le cabinet cite la Corée du Sud) et bénéficient en plus de rabais et de réduction. Ils passent soit directement des commandes, soit via des intermédiaires (comme des agences de voyages) pour obtenir ainsi des prix très bas avant de revendre leurs marchandises à un prix supérieur en Chine continentale ou dans des duty free chinois.
En Europe, la déception est aussi palpable. Le groupe, qui s'était illustré dans la région au 3ème trimestre (+16,2%), accuse le coup et a vu son activité ralentir à 11,6% contre 14,6% attendu par les analystes au quatrième trimestre. "L'Europe n'a pas non plus répondu aux attentes de manière satisfaisante, après avoir enregistré des progrès significatifs au cours des trimestres précédents", déplore RBC.
Les autres régions ont dépassé les attentes, notamment l'Amérique latine. L'Oréal y a enregistré une croissance de 23,4% en données comparables quand le consensus tablait sur une hausse de 19,3%. Mais cet élément satisfaisant de la publication ne peut occulter les déceptions en Asie du Nord et en Europe.
D'ailleurs cette inquiétude est soulignée par RBC. "Nous sommes pas sûrs que d'autres régions puissent durablement compenser les défis en Asie, étant donné la faiblesse sous-jacente du marché et la forte pénétration de L'Oréal en Chine. Cette série de résultats renforce cette crainte", explique la banque canadienne.
Entre octobre et fin décembre, L'Oréal a ainsi vu son chiffre d'affaires s'élever à 10,61 milliards d'euros, en hausse de 6,9% en données comparables. Or le consensus des analystes cité par Royal Bank of Canada attendait un chiffre de 9,1%. Pour la banque canadienne, la croissance organique des ventes de L'Oréal a donc été "décevante" au 4ème trimestre. "C'est le contraire de ce à quoi nous nous sommes habitués au fil du temps", poursuit la banque canadienne.
À la Bourse de Paris, la publication décevante de L'Oréal est logiquement sanctionnée. Plus forte baisse du CAC 40, le titre chute de 6,8% vers 10h00 et accuse son plus fort repli depuis fin octobre 2022 (-5,80%).
Les investisseurs avaient déjà réagi négativement jeudi soir à Wall Street, L'Oréal ayant dévoilé ses comptes après la clôture des marchés européens. À New York, l'ADR - des certificats de dépôts qui permettent à des investisseurs basés aux Etats-Unis d'investir dans des groupes étrangers - reculait déjà de 6,5%, jeudi soir.
Une marge record mais...
Sur l'ensemble de l'année 2023, le groupe vu ses revenus s'établir à 41,18 milliards d'euros, en croissance organique de 11%. L'Oréal se félicite d'avoir réalisé une troisième année consécutive de croissance à deux chiffres en organique. Mais si on regarde d'un peu plus près, l'Oréal a aussi manqué de peu le consensus tant sur les ventes (41,493 milliards d'euros) que sur la croissance organique (+11,6%). Et le groupe fait moins bien qu'en 2022, qui avait vu les ventes de l'Oréal bondir de 18,5% en données publiées et de 10,9% à données comparables.
Le résultat opérationnel s'avère aussi légèrement inférieur aux attentes à 8,143 milliards d'euros contre les 8,207 milliards espérés par les analystes, selon RBC. Le taux de marge correspondant, à 19,8%, ressort à un niveau "record" et est conforme aux anticipations du marché. Dernière ligne du compte de résultat, le bénéfice net part du groupe s'est établi à 6,184 milliards d'euros, en hausse de 8,4% sur un an.
Comme à son habitude, L'Oréal n'a pas donné d'objectifs chiffrés pour l'année en cours. La société se dit optimiste "quant aux perspectives du marché de la beauté, et confiante dans sa capacité à le surperformer pour réaliser une nouvelle année de croissance du chiffre d’affaires et des résultats".
L'Oréal a réaffirmé ses ambitions dans la "beauty tech", c'est à dire dans la technologie de la beauté grâce à l'intelligence artificielle. Le groupe français avait d'ailleurs ouvert le bal du CES 2024, la grand-messe de l'innovation qui se tient chaque année à Las Vegas.
"Plus que jamais, L’Oréal est tourné vers l’avenir: un avenir dans lequel la beauty tech aura une place centrale. La beauty tech va façonner notre industrie et nous permettre d’asseoir davantage notre leadership", poursuit Nicolas Hieronimus, directeur général de L'Oréal.
Mais les marchés ne sont pas sensibles aux perspectives délivrées par L'Oréal. À l'image d'UBS, ils redoutent les conséquences sur la société d'une normalisation de la demande dans l'univers de la beauté.
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