(BFM Bourse) - Même en tenant compte des besoins financiers qui perdureront plusieurs années pour Carmat, Degroof Petercam estime qu'en l'absence de concurrence sérieuse, les perspectives commerciales du cœur artificiel Aeson justifient un objectif de cours de 25,40 euros, amenant les analystes de la banque belge à adopter un conseil d'achat.
Avec sa prothèse cardiaque Aeson, désormais au stade commercial, la société française Carmat a porté le développement d'un cœur artificiel à un niveau jamais atteint, souligne lundi une nouvelle étude d'analystes. L'idée de remplacer l'organe humain défaillant par un dispositif fabriqué de toutes pièces est loin d'être neuve (théorisée dès le XIXe siècle) mais le parcours jusqu'ici a été long. Ce n'est qu'en 1982 que le premier "cœur artificiel total" -TAH pour Total Artificial Heart, c'est-à-dire une prothèse remplaçant les deux ventricules à la différence des dispositifs d'assistance ventriculaire gauche ou droite- a été implanté. Malgré des inconvénients inhérents à sa technologie (cœur pneumatique bruyant et brutal pour le système circulatoire) celle-ci a ensuite donné lieu au premier cœur artificiel total commercialement homologué par Syncardia à partir de 1999 (ce dernier actuellement suspendu en Europe à nouveau en raison de problèmes de qualité).
L'hypothèse de l'arrivée de xénogreffes (greffons en provenance d'espèces animales) ne semble pas en mesure de changer la donne avant 10 à 15 ans au moins, selon le chirurgien qui a réussi en janvier 2022 la première implantation d'un cœur porcin génétiquement modifié, le Dr. Bartley Griffith lui-même. À noter que le patient opéré est malheureusement décédé deux mois plus tard, pour des raisons pas pleinement divulguées.
Dans une étude signée de Christophe Dombu et Laura Roba, Degroof Petercam souligne donc les avantages concurrentiels uniques qui font d'Aeson le cœur artificiel le plus avancé au monde. Il s'agit tout d'abord d'un cœur entièrement bioprothétique, la surface en contact avec le sang étant réalisée dans un matériau hémocompatible - ce qui réduit notamment les risques d'hémolyse, c'est-à-dire de lésion et destruction des globules rouges. La prothèse reproduit en outre le rythme pulsatile du cœur humain (la pompe change de direction toutes les 2 millisecondes permettant au fluide activateur un mouvement de va-et-vient des membranes, imitant le mouvement des deux ventricules), là aussi pour éviter des anomalies pathologiques potentiellement graves. Le système à base de fluide a en outre l'avantage d'être silencieux. Enfin le produit de Carmat embarque des senseurs capables de déterminer les besoins physiologiques en fonction de l'activité du patient, pour ajuster le rythme cardiaque en conséquence grâce à un algorithme.
Des besoins qui explosent
Selon les analystes, Aeson pourrait apporter une solution chaque année à des milliers de patients souffrant d'insuffisance cardiaque terminale, sachant qu'aujourd'hui seulement 3% des patients en attente de transplantation reçoivent un greffon de donneur, le nombre de greffons restant globalement stable ces dernières années alors que les besoins explosent. Un marché sans réelle concurrence pendant des années, vu le niveau encore précoce des autres projets en cours: ReinHeart en Allemagne, Realheart en Suède ou Smartheart aux USA, estime Degroof Petercam. Alors que les ventes ont déjà démarré et devraient reprendre en octobre, le bureau d'études estime à 750 millions d'euros le pic annuel de ventes une fois qu'Aeson sera prescrit à titre de prothèse définitive (Destination Therapy) en plus d'une solution en attente de greffon humain (Bridge To Transplant). Et si le développement de l'entreprise a jusqu'ici été émaillé de retards cliniques, réglementaires et de production, l'analyste note que ces problèmes sont fréquents dans le secteur y compris chez de bien plus grands acteurs du dispositif médical. "Nous estimons que Carmat a la capacité de franchir ces obstacles, ainsi qu'il l'a démontré à plusieurs reprises".
En termes financiers, Degroof Petercam avertit que les efforts cliniques resteront intenses dans les trois prochaines années, ce qui nécessitera encore environ 120 millions d'euros d'investissements (avant déduction d'éventuelles subventions), et que l'entreprise devra encore mener des refinancements, le prochain d'ici mars 2023 vraisemblablement. Cependant, l'horizon de la rentabilité est attendu pour 2027.
Sur ses principales hypothèses, Degroof Petercam calcule que la juste valeur du titre se situe à 25,40 euros, amenant le bureau d'études de la banque belge d'investissement à adopter un conseil d'achat sur la valeur. Un avis qui trouve un écho certain lundi en Bourse, le titre grimpant de 9,03% à 12,44 euros vers 16h15.
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