(BFM Bourse) - Cette expression renvoie aux comportements et aux anticipations de marché à l'aune du programme du candidat républicain à la Maison Blanche. Ce "Trump trade" a récemment gagné en puissance dans la mesure où les investisseurs intègrent de plus en plus une victoire de l'ex-président.
La présidentielle américaine reste très indécise. Du moins dans les sondages, où le républicain Donald Trump talonne la démocrate Kamala Harris, selon le New York Times.
Les marchés, eux, se préparent assez clairement à une victoire de l'ex-locataire à la Maison Blanche, ces derniers jours. "Les marchés financiers tablent désormais sur une victoire de Donald Trump, d’où la hausse du dollar, de l’or, du bitcoin et des taux de rendement sur l’obligataire américain. La campagne du républicain bénéficie d’un véritable élan. Les sondages sont plus serrés que jamais, ce qui tend généralement à lui donner l’avantage, tant il a été sous-estimé par le passé", a souligné lundi Christopher Dembik, conseiller en investissement chez Pictet AM.
"Il ne reste plus qu'une semaine avant l'élection américaine, et les prédictions, les paris et les marchés financiers penchent de plus en plus en faveur d'une victoire de Trump", juge de son côté Deutsche Bank.
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Baisse de l'immigration et hausse du déficit
Il y a ainsi eu une résurgence de ce que l'on appelle le "Trump trade". Pour simplifier, le "Trump trade" renvoie aux anticipations des investisseurs quant aux conséquences économiques du programme du candidat républicain.
Comme le soulignait Quasar Elizundia, stratégiste chez Pepperstone, en juillet, ce "Trump trade" s'appuie sur plusieurs points. Premièrement, une diminution de l'immigration qui se traduirait par un coût du travail plus élevé et donc un par un regain d'inflation.
"La réduction de l'immigration légale et illégale tend à diminuer l'offre de main-d'œuvre bon marché, ce qui peut entraîner une augmentation des coûts de main-d'œuvre. Cela pourrait à son tour créer une pression inflationniste, les entreprises essayant de répercuter ces coûts supplémentaires sur les consommateurs", explique le stratégiste.
Deuxièmement, le marché intègre une politique budgétaire plus expansionniste, alors que Donald Trump compte, par exemple, abaisser le taux d'impôt sur les sociétés de 21% à 15%. Ce qui aurait pour corollaire de tirer vers le haut les coûts d'emprunt de l'état fédéral américain.
Dernier point: une hausse des tarifs douaniers et donc du coût des importations. "Trump est également connu pour son approche protectionniste, avec la possibilité d'imposer des droits de douane supplémentaires sur diverses importations", rappelle Quasar Elizundia.
"Ces droits de douane augmentent le coût des biens importés, ce qui peut entraîner une hausse des prix pour les consommateurs américains et provoquer des représailles commerciales de la part d'autres pays. L'incertitude commerciale qui en résulte peut avoir un impact négatif sur les chaînes d'approvisionnement mondiales et accroître la volatilité du marché", ajoute-t-il.
Les obligations dans le dur, l'or, le dollar et le bitcoin soutenus
Il en ressort un certain nombre de mouvements sur différentes classes d'actifs. Le "'Trump Trade" désigne un comportement de marché dans lequel les indices actions grimpent, le dollar grimpe ainsi que les taux, en prévision de mesures de stimulation fiscales et d’allègements règlementaires", résume Alexandre Baradez, d'IG Markets.
"Les mesures économiques et fiscales que Donald Trump souhaiterait mettre en place entretiendraient potentiellement un contexte inflationniste aux Etats-Unis d’où le rallye sur les taux et le dollar", ajoute-t-il.
Le "Trump trade" s'est clairement observé sur les taux américains. Le rendement à 10 ans du bon du Trésor américain est passé d'environ 3,7% au début du mois à 4,33% actuellement. De façon assez logique, le dollar, dont l'évolution dépend des rendements obligataires et des anticipations des décisions de la politique monétaire de la Réserve fédérale américaine (Fed) a progressé, reprenant 2,6% face à l'euro sur un mois.
"Le 'pari Trump' (Trump trade) a entraîné une remontée des rendements, en particulier sur la partie longue de la courbe. Il s’est également traduit par une hausse de l’indice dollar, même si le yen a poursuivi son redressement face au billet vert dans la perspective d’une possible décision de la Banque du Japon en fin de mois", a commenté César Pérez Ruiz, responsable des investissements chez Pictet Wealth Management, la semaine dernière.
Christopher Dembik lie aussi au "Trump trade" la récente hausse de l'or (qui en fait monte quoi qu'il arrive en ce moment). Si les conséquences sur les taux d'une victoire du candidat républicain sont théoriquement négatives pour le métal précieux (une hausse des taux d'intérêt est, sur le papier défavorable à l'or qui ne produit pas de revenus comme des coupons ou des dividendes), l'or pourrait bénéficier d'un regain d'incertitude et de tensions géopolitiques.
"Les rumeurs selon lesquelles Donald Trump serait sur le point de remporter l'élection ont encore alimenté la demande d'or, qui a atteint des sommets historiques. Alors que les perspectives d'un second mandat pour le candidat républicain augmentent, les marchés se tournent vers l'or, l'ultime valeur refuge", commentait ainsi mi-octobre Ricardo Evangelista, d'Activtrades.
Le bitcoin lui aussi a été récemment porté par le "Trump trade" tout simplement parce que le candidat républicain a multiplié les déclarations d'amour à la reine des cryptomonnaies ces derniers mois. Donald Trump avait ainsi tout simplement promis, en septembre, de faire des Etats-Unis "la capitale mondiale du bitcoin et des cryptomonnaies".
Des prises de profits?
L'impact sur les marchés actions est plus difficile à cerner, tant ce marché dépend d'autres facteurs. Mais les indices américains continuent de progresser, le S&P 500 prenant 1,9% sur un mois et 7% sur trois mois. Dans une récente note, Ombretta Signori, directrice de la recherche macroéconomique pour OFI AM, écrivait "qu'une victoire de Donald Trump serait théoriquement plus favorable aux actions, notamment en raison des baisses d'impôts".
Reste à savoir toutefois si le marché n'est pas allé un peu vite en besogne sur ce "Trump trade". "Plusieurs 'Trump trades' ont gagné du terrain, (la hausse) du dollar étant sans doute l'une d'entre elles. Selon nous, l'élection reste trop serrée pour être anticipée, et la probabilité d'un résultat incertain le lendemain matin de l'élection est élevée", prévenait il y a deux semaines UBS.
Citée par Bloomberg, la banque Citi recommandait même, la semaine dernière, de prendre des bénéfices sur le "Trump trade". "Bien que les investisseurs aient conclu que Trump serait le vainqueur, les sondages ne sont que modérément en sa faveur", écrivait-elle.