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Marché : Les gérants qui débutent leur carrière pendant une récession sont plus performants

samedi 11 septembre 2021 à 07h00
Les gérants de fonds sont influencés par leur début de carrière

(BFM Bourse) - Les prises de décisions et les performances des gérants sont influencées par les conditions de marché dans lesquelles ils débutent leur carrière. Tel est le constat d'une étude menée par Meziane Lasfer, professeur à la Bayes Business School, qui chiffre même la surperformance des fonds gérés par des gestionnaires ayant commencé leur carrière en récession à plus de 2% en rendement annualisé par rapport aux autres fonds.

Nombreuses sont les études tentant de percer à jour les secrets des gérants surperformant le marché et, dans cette optique, celle publiée dans le prestigieux Journal of Corporate Finance par le professeur de finances de la Bayes Business School (anciennement Cass) Meziane Lasfer et ses coauteurs des université de Leeds (Jie Chen), Southampton (Wei Song) et Shanghai (Si Zhou), apporte un nouvel élément de réponse.

Grâce à un travail de fourmi, à savoir une vaste collecte de données (âge, sexe, diplômes, année du premier travail, etc.) sur 960 gérants de fonds états-uniens ayant exercé entre 1990 et 2016, ces chercheurs ont réussi à démontrer que les gérants ayant débuté leur carrière lors d'une année de récession surperforment nettement les autres.

Ils ont pour ce faire isoler deux groupes, à savoir les "gérants récession" (148 personnes) ayant démarré leur carrière en 1990, 2001 ou encore 2009, et les autres (812 personnes). Si le nombre d'années nécessaires pour gravir les échelons (assistant, analyste, associé, directeur) et accéder au poste de "manager" diffère peu entre les deux groupes (17,39 années pour les premiers en moyenne contre 17,64 pour les seconds), tout comme l'actif net total moyen de leur premier fonds (515 millions de dollars pour les "gérants récession", 556 millions pour les autres), les performances affichent en revanche un écart statistiquement significatif

Surperformance notable

Les "gérants récession" affichent plus précisément des rendements annualisés supérieurs de 2,25% selon le MEDAF, de 2,46% selon le modèle à trois facteurs de Fama-French et de 2,44% selon le modèle à quatre facteurs de Carhart (soit les principaux modèles d'évaluation d'actifs financiers) par rapport aux fonds gérés par des gestionnaires qui ont débuté leur carrière dans des conditions favorables.

Selon les chercheurs, cela tient au fait que les "gérants récession" anticipent mieux le marché pendant les turbulences économiques, au moyen d’avoirs liquides plus élevés et d’investissements dans des secteurs plus défensifs. Ces mêmes gérants ne sélectionnent en revanche pas mieux les valeurs que les autres lors des périodes plus porteuses, conclut également l'étude.

Plus réceptif à son environnement en début de carrière

Le professeur Meziane Lasfer explique que ces conclusions révèlent l’influence profonde de l’environnement en début de carrière, et que cela pourrait s’appliquer à d’autres professions que la gestion des fonds. "Les personnes sont plus réceptives aux stimulations de leur environnement en début de carrière, en raison d’une courbe d’apprentissage abrupte et de leur ardeur pour impressionner leurs supérieurs et s’adapter à une façon de faire les choses" explique-t-il.

"Les gestionnaires de fonds qui commencent leur carrière dans des conditions macroéconomiques difficiles, par exemple des périodes de récession, surpassent nettement le marché: ils font preuve spécifiquement d’une meilleure anticipation que leurs homologues ayant débuté dans des conditions économiques relativement sûres (...) Ils font pencher leurs investissements vers des secteurs défensifs, plutôt que cycliques, pendant et avant des chocs macroéconomiques difficiles" développe-t-il.

"Globalement, j’espère que cette étude apportera de l’espoir aux débutants d’aujourd’hui, qu’ils travaillent dans les services financiers ou dans d’autres secteurs" ayant subi les effets de la pandémie, confie le professeur, qui tient à leur dire que "les épreuves qu’ils traversent maintenant [leur] apporteront la résilience et les compétences pour négocier les chocs à venir". Meziane Lasfer n'a par ailleurs pas été influencé par la crise sanitaire et la récession actuelles puisqu'il a commencé son étude il y a plus de 6 ans.

Potentiel biais

Les chercheurs ont également adressé les biais potentiels, notamment concernant la sélection endogène des gestionnaires de fonds qui, en période de récession, se tournent naturellement vers les candidats les plus talentueux, seuls recrutés dans un marché de l'emploi tendu, ce qui tendrait à augmenter logiquement les performances de ces futurs gérants. Pour atténuer ce problème, ils ont conduit plusieurs tests pour constater notamment que les "gérants récession" sont moins susceptibles d'être diplômés d'universités de l'Ivy League.

Deuxièmement, si les gestionnaires de récession qui ont commencé leur carrière en période de récession sont plus talentueux et ont de meilleures perspectives d'emploi, on peut s'attendre à ce qu'ils aient besoin de moins de temps pour devenir gérants et/ou qu'ils soient plus susceptibles de commencer leur carrière dans de grands fonds, ce qui n'est pas le cas non plus, et invalide a priori ce possible biais.

Quentin Soubranne - ©2023 BFM Bourse
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