(BFM Bourse) - Les autorités suisses ont volé au secours de la banque helvétique. Pour la suite plusieurs observateurs estiment que la société va devoir poursuivre sa restructuration, voire se rapprocher avec un autre établissement.
La tempête s'est pour l'heure apaisée. Dans le collimateur des marchés mercredi, Credit Suisse a enrayé sa chute en Bourse grâce à l'intervention des autorités suisses, notamment de la Banque nationale Suisse (BNS) qui a accepté de lui fournir des liquidités. L'établissement a annoncé jeudi qu'il activait une option lui permettant d'emprunter jusqu'à 50 milliards de francs suisses, soit un peu plus de 50,7 milliards d'euros, auprès de la BNS.
Reste que cette intervention d'urgence des autorités suisses devra être suivie d'actions de Credit Suisse. "Le chemin vers une véritable embellie du panorama de Credit Suisse sera sûrement long, mais l’action des autorités suisses permet aujourd’hui d’éviter un accident aux conséquences néfastes", souligne Sebastian Paris Horvitz de La Banque postale asset management. Morningstar, estime que le soutien de la BNS donne du temps à la société pour se restructurer.
Quels scénarios pour le futur de la banque helvétique ? Voici quelques possibilités.
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Devenir la nouvelle Deutsche Bank
Credit Suisse pourrait bénéficier du temps accordé par le soutien de la BNS pour poursuivre, voire accélérer son plan de restructuration.
"Les liquidités de la BNS devraient contribuer à stabiliser les dépôts de Credit Suisse. Dans ce cas de figure, l'établissement aurait le temps de poursuivre sa restructuration en développant sa banque de détail en Suisse, de gestion de fortune dans plusieurs pays, notamment en Asie où le groupe a enregistré de beaux succès, tout en réduisant la taille de ses activités de banque de financement et d'investissement", explique David Benamou, directeur des investissements chez Axiom Ai.
"En fait, Credit Suisse suivrait un modèle proche de celui de Deutsche Bank à partir de 2019 qui s'est profondément restructurée. Cela a pris du temps mais la confiance est revenue sur l’établissement allemand", explique-t-il.
Ce plan nécessitera néanmoins de la patience car ces transformations prennent toujours du temps. "Le cours de Bourse risque de rester bas durant cette phase de restructuration, mais la banque continuerait son plan pour redevenir bénéficiaire, ce qui devrait prendre au moins 24 mois", considère David Benamou.
Citée par Reuters, la banque JPMorgan estime par contre que le "statu quo" n'est pas tenable.
Faire un appel au marché
Credit Suisse possède un ratio de solvabilité common equity tier one - un indicateur de solidité des fonds propres – de 14,1%.
Mais malgré cet indicateur élevé, Morningstar juge que le groupe "aurait besoin de capitaux supplémentaires pour financer les coûts de restructuration liés à la fermeture d’activités non rentables".
L'intermédiaire financier note toutefois que le refus de la Banque nationale saoudienne, qui possède un peu moins de 10% du capital, de remettre au pot, "rend difficile une émission de titres".
"Je n'y crois pas une seule seconde aujourd'hui car l'augmentation de capital que Credit Suisse a effectué fin 2022 est amplement suffisante pour financer la restructuration de l'établissement", juge de son côté David Benamou.
Effectuer des cessions
Morningstar estime que Credit Suisse pourrait céder "des unités de qualité supérieure" ou coter en Bourse "une participation minoritaire dans les activités bancaires suisses rentables".
Cette hypothèse est également évoquée par Reuters. L'agence cite un banquier qui explique que l'établissement helvétique est mieux valorisé à la découpe et qu'il existe des discussions sur des potentielles transactions en ce sens.
Être vendue à un concurrent ?
Cette idée semble gagner du terrain dernièrement. "Credit Suisse a 50 milliards de capital règlementaire mais vaut désormais en Bourse entre 6 milliards et 8 milliards d'euros, selon les journées, c'est à peine une année de bénéfices d'UBS ou de BNP Paribas et on ne parle même pas des banques américaines", souligne David Benamou.
"Le groupe pourrait intéresser de nombreux acteurs, surtout ceux qui recherchent une belle franchise dans la gestion de fortune. Les potentiels acquéreurs risquent toutefois de ne pas vouloir racheter la banque de financement et d'investissement, qui représente d'importants coûts de restructuration et possède un business plan qui n'est pas encore complètement clair pour la communauté des analystes", développe-t-il.
Citée par Quartz, JPMorgan a souligné dans une note qu'UBS apparaît comme le "sauveur" le plus naturel de Credit Suisse. Selon elle, l'autre banque suisse pourrait fermer les activités de trading, garder la gestion de fortune de Credit Suisse et mettre en Bourse celles de banque de détail en Suisse, de sorte à éviter les griefs des autorités de la concurrence sur cette activité.
Toutefois, selon des personnes proches du dossier, citées par Bloomberg, aussi bien UBS que Credit Suisse seraient opposés à un rapprochement forcé.
Une faillite est improbable
L'ensemble des observateurs s'accordent à penser qu'une "résolution" est improbable au regard des dommages que cela causerait à l'économie suisse et au système financier international. "Il existe toujours ce scénario de résolution de la banque, c'est-à-dire de faillite, mais il est tout simplement fantaisiste car cela concernerait un établissement sans capital et liquidités, et on est à des années lumières de cela avec Credit Suisse", abonde David Benamou.
Interrogé par BFM Bourse, un porte-parole de Credit Suisse n'a pas fait de commentaires sur les différents scénarios cités par les experts.