(BFM Bourse) - Le groupe de communications et de médias a présenté au marché ce lundi les perspectives de la chaîne cryptée, qui doit normalement s'introduire en Bourse à Londres le mois prochain. Canal+ anticipe une croissance modérée de ses revenus à moyen terme.
Vivendi affine sa division par quatre. Le groupe de médias, communication et d'édition tiendra le 9 décembre une assemblée générale qui amènera ses actionnaires à approuver (ou rejeter) son projet de scission entre quatre entités. Canal+, Havas et Louis Hachette Group devront prendre leur indépendance en étant cotées à part, respectivement à la Bourse de Londres, Amsterdam et Paris (sur Euronext Growth). Vivendi de son côté, resterait côté, en continuerait de gérer ses participations dans le groupe de jeu vidéo Gameloft et la maison de disques Universal Music Group.
Dans le cas où cette scission en quatre serait approuvée par les actionnaires, Canal+, Havas et Louis Hachette serait cotées dès le 16 décembre sur leurs places financières respectives.
En amont de ce rendez-vous, Canal+ et Havas organisent chacun des journées dédiées aux investisseurs, c'est-à-dire un rendez-vous qui doit permettre aux sociétés de se présenter sous leur meilleur jour au marché.
Canal+ en tient une ce lundi et Havas lui emboîtera le pas mardi. La chaîne cryptée a, dans cette optique, donné un peu de visibilité sur son activité au marché.
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Une valorisation à plus de 3 milliards d'euros pour Canal+
Le groupe audiovisuel a indiqué tabler sur une croissance en 2024 "en ligne avec celle de 2023" (soit autour de 3% en données comparables).
Pour 2025, Canal+ estime que "l’arrêt attendu de la diffusion de sa chaîne française gratuite C8 ainsi que la résiliation des contrats de sous-licence et des contrats onéreux de contenu tiers en France, affecteront négativement le chiffre d’affaires et devraient plus que compenser la croissance organique", indique la société.
Au-delà de 2025, Canal+ s'attend à la poursuite d'une croissance annuelle "modérée" à périmètre constant, à moyen terme. UBS, de son côté, retenait une croissance de 2,1% en 2024, 2,1% en 2025 et de 2% par an entre 2025 et 2028.
L'entreprise table également sur amélioration" modérée" de sa marge opérationnelle ajustée à moyen terme, toujours à périmètre constant. Pour cela la société s'efforcera notamment "d'optimiser" les coûts.
Enfin, les flux de trésorerie opérationnels (CFFO) devraient, selon Canal+, retrouver "en 2025 un niveau similaire à celui de 2023 (398 millions d'euros, NDLR)", après un niveau "exceptionnellement bas en 2024". Vivendi explique que Canal+ a été pénalisé "par des effets de besoin en fonds de roulement au second semestre 2024 dus à une concentration exceptionnelle de paiements liés au renouvellement et à la signature de contrats de contenus, ainsi qu’à de possibles paiements non récurrents liés aux propositions de rectifications fiscales".
À voir si ces indications inciteront les investisseurs à se positionner sur Canal+. Pour le moment UBS valorise la chaîne cryptée à environ 4 milliards d'euros et recommande d'acheter l'action Vivendi.
Par ailleurs, si Havas tiendra mardi sa journée investisseurs, Vivendi a rappelé ce lundi ses perspectives de moyen terme. Le groupe de communication anticipe une évolution de ses revenus comprise entre -1% et 0% en 2024 en données comparables, avant un rebond de plus de 2% en 2025. Son résultat opérationnel ajusté est attendu à plus de 330 millions d'euros en 2024 et devraient ensuite représenter entre 12,5% et 13,5% des revenus en 2025. Havas entend par ailleurs proposer un dividende représentant environ 40% du résultat net de l'exercice 2024 en 2025.
Des places de cotation discutées
À la Bourse de Paris, l'ensemble de cette communication est reçu tièdement par le marché, l'action Vivendi reculant de 1,3% vers 11h10.
Rappelons que le but de Vivendi, en se scindant en quatre, est de réduire la décote de conglomérat, c'est-à-dire la différence (négative) entre sa valeur de marché et celle de la somme de l'ensemble de ses actifs. Fin 2023, avant que le groupe annonce son projet de scission, cette décote représentait 45%, selon Barclays.
En cotant Canal+, Havas et Louis Hachette à part, Vivendi entend obtenir des multiples de valorisations plus généreux pour chaque entité et donc créer de la valeur pour ses actionnaires, au premier rang desquels le groupe Bolloré. Vivendi avait très bien réussi le coup en 2021 en introduisant en Bourse Universal Music Group, à Amsterdam. La maison de disques pèse aujourd'hui 42 milliards d'euros en Bourse.
Les décisions de coter Canal+ à Londres et Havas à Amsterdam ont toutefois pu faire grincer quelques dents. Pour Canal+, le choix de Londres doit lui permettre de refléter sa dimension internationale, alors que la société est actuellement en train de racheter le groupe sud-africain Multichoice pour plus de 2,5 milliards d'euros. Quant à Havas et Amsterdam , il s'agit de bénéficier des flexibilité du droit néerlandais en créant une fondation qui doit "préserver l'indépendance" de la société de communications.
Le fonds d'investissement Ciam, connu pour épingler les défauts de gouvernance et les opérations trop chiches pour les minoritaires à son goût, a, de son côté, saisi l'Autorité des marchés financiers (AMF) pour contester cette opération.
Le fonds a fait valoir que, tant pour Canal+ qu'Havas et Louis Hachette Group, le choix de la place de cotation n'a qu'un seul but: déroger aux règles qui, sur le marché réglementé, imposent de lancer une offre publique d'achat (OPA) si un actionnaire franchit le seuil de 30%. Rappelons que le groupe Bolloré possède actuellement un peu moins de 30% de Vivendi.
"Le projet de scission partielle de Vivendi en trois entités cotées sur trois places moins respectueuses du droit des actionnaires minoritaires permettrait à l’actionnaire de contrôle de vider Vivendi de ses actifs essentiels tout en renforçant son contrôle sur Canal+, Havas et Louis Hachette Group sans avoir à lancer d’offre publique. Elle priverait ainsi les actionnaires minoritaires des dispositions protectrices du droit boursier français", a argué Ciam dans un communiqué de presse. Le fonds demande ainsi que les trois sociétés soient cotées sur le marché réglementé français.
Interrogé par BFM Bourse, Vivendi a rappelé qu'il ne commentait pas les accusations de Ciam.
"En prévoyant de coter Canal Plus et Havas sur des places boursières hors de France, respectivement à Londres et à Amsterdam, Bolloré contourne à la fois le contrôle de l'AMF et l'évaluation de sa stratégie par un marché plus large", a de son côté jugé le bureau d'études Alphavalue dans une récente note.