PARIS (Reuters) - Episode de la crise financière, l'abandon par le patron de la banque franco-belge Dexia d'une indemnité de départ de près de quatre millions d'euros accentue la pression pour l'encadrement des "parachutes dorés".
Alors que le Parlement français sera saisi fin octobre d'une proposition en ce sens, l'administrateur délégué de Dexia, Axel Miller, a annoncé lui-même dans un communiqué qu'il ne partirait pas avec une enveloppe de 3,7 millions d'euros, comme prévu.
C'était la condition posée par la France à sa participation au plan de recapitalisation de 6,4 milliards d'euros annoncé mardi pour permettre au leader mondial du financement des collectivités locales de faire face à la crise, dit-on à Bercy.
C'est la première fois que le gouvernement français intervient directement dans une affaire de ce type et la deuxième qu'un patron d'un établissement au moins en partie français renonce à ses indemnités.
En 2004, Pierre Bilger, parti en 2003 d'Alstom, société sauvée du démembrement par l'intervention de l'Etat, avait renoncé à une indemnité de 4,1 millions d'euros. Le fait étant exceptionnel, il avait ensuite publié un livre intitulé "Quatre millions d'euros, le prix de ma liberté".
Le gouvernement français a évoqué dimanche un autre nom, celui de l'Américaine Patricia Russo, qui doit percevoir six millions d'euros d'Alcatel-Lucent, dont elle a été chassée après des résultats désastreux. "Quand le parachute doré est une prime à l'échec, c'est scandaleux", a dit dimanche Claude Guéant, secrétaire général de l'Elysée, à propos de cette affaire.
LE PATRONAT RÉTICENT
Le patronat français est réticent devant la "liberté" revendiquée par Pierre Bilger. Tout en condamnant la pratique, ses instances avaient jusqu'ici appelé la profession à l'auto-régulation en refusant toute réglementation.
Juste avant que Nicolas Sarkozy ne reprenne une promesse de campagne sur le sujet lors de son discours de Toulon sur la crise la semaine dernière, la présidente du Medef a promis que le "comité d'éthique" du Medef ferait des propositions.
La présidente du Medef, Laurence Parisot, dévoilera le "code de gouvernement d'entreprise" adopté après la constitution d'un comité d'éthique interne au patronat.
Il risque d'être pris de vitesse, François Fillon ayant élargi le sujet vendredi.
"Il faut mieux encadrer les modes de rémunération des dirigeants et des opérateurs pour favoriser les comportements responsables", a-t-il dit.
L'UMP, jusqu'ici très hostile à toute idée de réglementation, a pris les devants avec un amendement modéré et technique sur le sujet, avançant l'idée d'un plafonnement des avantages fiscaux consentis aux entreprises au titre des parachutes dorés.
Ces avantages fiscaux ne seraient plus accordés par l'Etat qu'en cas de "parachute" de moins d'un million d'euros. Il serait inclus dans la loi de finances 2009.
Nicolas Sarkozy était allé plus loin dans son discours de Toulon proposant de les interdire pour les dirigeants ayant "commis des fautes ou mis l'entreprise en difficultés". Il disait aussi refuser les actions gratuites pour les dirigeants et a souhaité que les dirigeants ne puissent bénéficier de stock-options que si les salariés ont un intéressement.
Le sujet est juridiquement très délicat, car le contournement de l'interdiction ou de l'encadrement des parachutes dorés semble aisé pour les entreprises.
Il est ainsi possible de le remplacer par un "golden hello", le versement d'une prime à l'arrivée. Les projets évoqués pour l'instant ne visent en outre pas la "retraite-chapeau" (versement direct aux dirigeants par les société de retraites, en une seule prime ou sous forme de rente mensuelle).
L'arme la plus efficace serait l'impôt. Actuellement, les titulaires de "parachutes dorés" bénéficient du "bouclier fiscal" limitant les prélèvements à 50% des revenus.
La justice pénale n'a jamais pu condamner faute de fondements juridiques. Elle poursuit une enquête préliminaire de police sur le parachute doré de Noël Forgeard, parti avec huit millions d'euros en 2006 de la direction d'EADS en pleine déroute du programme A380.
Thierry Lévêque, par Yves Clarisse
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