par William Schomberg
LONDRES, 18 décembre (Reuters) - La Banque d'Angleterre (BoE) a abaissé ses taux directeurs jeudi à l'issue d'un vote serré et a indiqué que le rythme déjà progressif de la réduction des coûts d'emprunt pourrait encore ralentir.
La décision du comité de politique monétaire (MPC) de la BoE de ramener le principal taux directeur de 4,0% à 3,75%, quatrième baisse sur l'année 2025, a été prise par cinq voix contre quatre, comme le prévoyait le consensus Reuters. Elle intervient au lendemain de la publication des chiffres de l'inflation britannique qui montrent un ralentissement plus marqué que prévu, à 3,2% en novembre en rythme annuel.
Parallèlement, une nouvelle prévision des experts de la BoE indique que la croissance économique stagnera à la fin de 2025.
Quatre membres du MPC se sont prononcé en faveur d'un statu quo sur les taux car ils craignaient que le taux d'inflation britannique, qui reste le plus élevé du G7, ne s'enracine.
Le gouverneur de la BoE, Andrew Bailey, a changé d'avis et a voté en faveur d'une baisse, ce qui a fait pencher la balance au sein du MPC.
"Nous pensons toujours que les taux sont sur une trajectoire graduelle vers le bas", a-il déclaré, cité dans un communiqué. "Mais avec chaque réduction que nous effectuons, la question de savoir jusqu'où nous irons devient plus difficile à trancher", a-t-il ajouté.
Andrew Bailey a dit ne pas observer encore de preuve d'un ralentissement plus marqué du marché de l'emploi, mais il a également noté que les attentes en matière d'inflation n'avaient pas reculé de manière significative jusqu'ici.
Le comité de politique monétaire de la BoE a abondé dans le sens d'Andrew Bailey dans sa déclaration de fin de réunion. Certains responsables de la banque centrale ayant voté contre une baisse des taux ont cependant clairement exprimé leurs inquiétudes.
La vice-gouverneure de la BoE, Clare Lombardelli, a déclaré qu'elle restait davantage préoccupée par le fait que l'inflation soit plus forte que prévu et que les données récentes ne s'étaient atténuées qu'"à la marge".
Le chef économiste de la BoE, Huw Pill, a dit pour sa part qu'il voyait un plus grand risque de stagnation de l'inflation à un niveau trop élevé qu'à un niveau trop bas.
MOINS DE RISQUE SUR L'INFLATION
Sur les marchés financiers, l'indice FTSE à la Bourse de Londres était pratiquement stable, tandis que la livre sterling prenait 0,16%, à 1,34 dollar immédiatement après la décision de la BoE. Le rendement du Gilt à deux ans, le plus sensible aux fluctuations sur les taux, s'est lui retourné à la hausse et progressait de 5,4 points de base, à 3,77%.
La baisse de taux de ce jeudi ramène les coûts d'emprunt à leur niveau le plus bas depuis près de trois ans, mais ils restent encore près de deux fois supérieurs aux taux de la Banque centrale européenne (BCE), qui doit également rendre sa décision de politique monétaire ce jeudi.
L'inflation britannique reste plus élevée que dans les économies comparables, en partie à cause de la décision l'an dernier de la ministre des Finances Rachel Reeves de relever les cotisations payées par les entreprises.
Dans son communiqué de politique monétaire, la BoE écrit s'attendre "désormais à ce que l'inflation retombe plus rapidement vers l'objectif visé à court terme" et que le risque que l'inflation s'enracine à des niveaux élevés est "devenu un peu moins prononcé".
Le fait qu'un affaiblissement de la demande fasse baisser l'inflation à un niveau trop bas demeure, peut-on également lire dans ce communiqué.
Les données publiées mardi ont montré un affaiblissement du marché de l'emploi, avec un taux de chômage remonté à un pic depuis 2021 et un ralentissement de la croissance des salaires dans le secteur privé.
CROISSANCE NULLE FIN 2025
La BoE dit anticiper désormais une croissance économique nulle au cours des trois derniers mois de 2025, alors qu'elle prévoyait encore le mois dernier une croissance de 0,3%. La banque centrale estime cependant que la croissance sous-jacente sera plus forte, à environ 0,2% par trimestre.
L'économie britannique s'est contractée de 0,1% au cours des trois mois à fin octobre, les entreprises ayant gelé leurs projets d'investissement en amont de la présentation du budget par Rachel Reeves le 26 novembre.
La BoE a dit s'attendre à ce que le budget fasse baisser l'inflation en 2026 d'environ un demi-point de pourcentage en raison de mesures ponctuelles, avant une légère remontée au cours des deux années suivantes.
Les mesures budgétaires ajouteraient au maximum 0,2 point de pourcentage à la taille de l'économie britannique en 2026 et 2027.
PRUDENCE POUR 2026
Pour Yael Selfin, chef économiste chez KPMG UK, la présentation la présentation par le MPC d'une politique devenue moins restrictive et la profonde division entre ses membres laissent penser qu'il sera difficile de trouver un consensus au sein du comité l'année prochaine.
"Par conséquent, nous prévoyons seulement deux baisses de taux d'intérêt en 2026, ramenant les taux à 3,25%", a-t-il déclaré.
Luke Bartholomew, chef adjoint économiste chez Aberdeen Investments, a dit pour sa part s'attendre à de nouvelles baisses de taux.
"L'économie devant rester faible l'année prochaine, et compte tenu des diverses mesures du récent budget visant à faire baisser l'inflation, nous pensons que d'autres baisses de taux sont à prévoir, le taux directeur finissant par revenir aux alentours de 3% vers la fin de l'année prochaine", a-t-il déclaré.
(William Schomberg, Andy Bruce et Suban Abdulla, Claude Chendjou pour la version française, édité par Blandine Hénault)
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