(BFM Bourse) - Le spécialiste des semi-conducteurs a pris près de 40% en deux séances et a dépassé les 1.000 milliards de dollars de capitalisation boursière. Ce que seulement huit groupes américains avaient accompli avant lui. Ses performances l'amènent à être comparé à Nvidia.
Le carton de la fin d'année à Wall Street est clairement Broadcom. Le groupe de semi-conducteurs s'est adjugé près de 40% sur deux séances, vendredi et lundi. Ce mardi, son titre marque une petite pause et perd 5,4% en début de séance.
Ce rallye a été déclenché, la semaine dernière, par les commentaires du directeur général de la société américaine, Hock Tan, lors de la présentation des résultats du quatrième trimestre.
Le dirigeant a livré des perspectives florissantes pour les puces du groupe utilisées pour l'intelligence artificielle (IA), notamment l'IA générative.
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"XPUs"
Rappelons qu'avec l'essor de cette technologie, les "hyperscalers" (Microsoft, Amazon ou Alphabet), c'est-à-dire les big tech américaines qui fournissent d'importants services d'informatique dématérialisée et développent les grands modèles de langage (LLM), ont de plus en plus recours aux produits de Broadcom.
Notamment ses puces Ethernet et ses processeurs XPUs qui sont dédiés à l'IA. Ces processeurs sont plus spécialisés que les processeurs graphiques (GPU) de Nvidia et donc moins versatiles. Mais ils sont davantage adaptés à des utilisations nécessitant une importante puissance de calcul, comme l'IA ou le "machine learning", explique TheStreet.com.
Sur l'ensemble de l'exercice 2023-2024, les produits de Broadcom dédiés à l'IA ont connu une croissance spectaculaire, digne de celle de Nvidia. Leur chiffre d'affaires a bondi de 220% sur un an à 12,2 milliards de dollars. La société a précisé que la croissance de ce segment devrait se situer autour de 65% pour le premier trimestre de l'exercice 2024-2025.
Surtout, Hock Tan, a déclaré que les puces pour l'IA représenteraient un marché adressable de 60 milliards à 90 milliards de dollars en 2027. À cet horizon trois clients "hyperscalers" devraient avoir déployer des millions de clusters de puces d'IA, avait ajouté Hock Tan.
"Nous sommes bien positionnés pour atteindre une part de marché majeure sur cette opportunité", avait-il clamé. Le dirigeant avait également annoncé que la société comptait deux "hyperscalers" parmi ses nouveaux clients.
Plus de 1.000 milliards de dollars de capitalisation boursière
Pour Bank of America, à l'achat sur l'action, Broadcom jouit d'opportunités en plein essor dans l'IA. La banque américaine estime que ses revenus de puces spécialisés pour l'IA devrait passer de 12,2 milliards de dollar sur l'exercice clos en 2024 à 30 milliards de dollars sur celui achevé fin octobre 2027.
Cette hypercroissance et ces perspectives prometteuses ont, donc, provoqué un violent rallye boursier ces derniers jours, permettant au passage à Broadcom de dépasser dès vendredi les 1.000 milliards de dollars de capitalisation boursière (la valeur de la totalité de ses actions).
Une prouesse que très peu de groupes américains avaient réussi jusque-là. Les Sept Magnifiques, du nom de ces "bigtechs" qui avaient connu une année 2023 grandiose en Bourse (Alphabet, Meta, Amazon, Microsoft, Nvidia, Apple, Tesla) ont touts dépassé ce seuil. Mais en dehors de ces sept titres, seul Berkshire Hathaway, la société d'investissement de Warren Buffet, y était brièvement parvenue au cours de l'été 2024.
Ce qui amène à s'interroger: doit-on désormais ajouter Broadcom aux Sept magnifiques de Wall Street?
Sa performance boursière plaide pour une telle intégration. À 1.167 milliards de dollars (avant l'ouverture de mardi, NDLR), la capitalisation boursière de Broadcom n'est pas très éloignée de celle de Tesla (1.486 milliards de dollars) et de Meta (1.575 milliards de dollars).
Sur l'ensemble de 2024, Broadcom s'adjuge 124%. Sur cette période, un seul membre des Sept magnifiques fait mieux, à savoir Nvidia, avec sa hausse de 166%. La progression moyenne de ce club de sept membres se situe autour de 67,6%.
En octobre dernier, Fortune écrivait que Broadcom, une "entreprise dont la plupart des gens n'ont jamais entendu" avait "botté Tesla en dehors des Sept magnfiques". Le groupe de semi-conducteurs devenait alors, selon le média américain, "le septième magnifique négligé". Certes, Tesla valait alors beaucoup moins en Bourse. L'action a plus que doublé depuis le 6 novembre et l'élection de Donald Trump, le marché anticipant des mesures favorables au groupe automobile. Mais l'article de Fortune montre que Broadcom tapait déjà à la porte des Sept magnifiques il y a quelques mois.
Rotation intra-sectorielle à Wall Street
Le site Sherwood News, qui est lié à la société de services financiers Robinhood, a d'ailleurs utilisé l'acronyme "BATMMAAN" (Broadcom, Alphabet, Tesla, Microsoft, Meta, Apple, Amazon, Nvidia) pour ajouter Broadcom aux Sept magnifiques. Avec donc une référence au justicier de Gotham City.
Au-delà de savoir si Broadcom doit rejoindre le club des Sept magnifiques, les comparaisons avec le parcours boursier de Nvidia vont bon train.
"C'est un peu comme le moment où Nvidia a livré des chiffres époustouflants, il y a peut-être un an et demi, et où tout le monde a dû rattraper son retard et chasser l'action", a déclaré Ken Mahoney, directeur général de Mahoney Asset Management, à Bloomberg.
"Si vous regardez les dernières publications de Nvidia, qui étaient très bonnes, l'action n'a pas tellement progressé. Ce qui est typique des valeurs où les bonnes nouvelles sont déjà énormément incluses. On a tiré très fort l'élastique sur Nvidia", a expliqué Stéphane Deo, gérant chez Eleva Capital, sur BFM Bourse, lundi.
Mais il y a "une capillarisation" du boom de l'IA sur d'autres sociétés, a ajouté le spécialiste. Et "le potentiel de rebond est peut-être plus fort sur un Broadcom ou d'autres valeurs comme cela que dans un Nvidia dans lequel une très grande partie des bonnes nouvelles sont déjà dans les prix", a ajouté le gérant, qui est investi dans Nvidia et Broadcom.
Ceci illustre une rotation du marché qui s'observe depuis quelques semaines à l'intérieur de la tech. Les investisseurs recherchent les prochaines poches de valeur et tentent d'identifier ainsi des bénéficiaires un peu moins évidents de l'IA que Nvidia ou Microsoft. Comme, donc, Broadcom ou même Salesforce.
"On s'attend à ce qui s'est passé dan l'IA sur les Sept magnifiques percole de plus en plus dans l'économie américaine à travers d'autres entreprises. Et les vrais gagnants de l'IA (en Bourse, NDLR) ne sont peut-être plus dans les Sept magnifiques", a résumé Vincent Juvyns de JP Morgan AM, également invité de BFM Bourse, lundi.