par Sumeet Desai et Jodie Ginsberg
LONDRES (Reuters) - La Grande-Bretagne annonce un vaste plan de soutien à son secteur financier prévoyant un programme de recapitalisation des banques de 50 milliards de livres (64,3 milliards d'euros) au plus et un apport de liquidités de la Banque d'Angleterre d'au moins 200 milliards de livres.
A l'issue de discussions particulièrement animées dans la nuit de mardi à mercredi qui ont suivi la chute spectaculaire des actions de certaines des plus grandes banques britanniques, le ministre des Finances Alistair Darling a présenté des mesures qui, dit-il, doivent donner un coup de pouce à l'activité de prêt et rétablir la confiance.
Le plan Darling prévoit d'augmenter les fonds propres des banques sous la forme de titres préférentiels ou instruments assimilés et de mettre au moins 200 milliards de livres (259 milliards d'euros) de liquidités à leur disposition suivant un "Special Liquidity Scheme" dans le but de débloquer le marché interbancaire.
Sept banques britanniques, Abbey, Barclays, HBOS, HSBC, Lloyds TSB, Royal Bank of Scotland, Standard Chartered et Nationwide Building Society, première société de crédit immobilier du pays, bénéficieront du programme de recapitalisation du gouvernement.
Elles se sont engagées à augmenter globalement leur capital de première catégorie (Tier 1) de 25 milliards de livres (32,4 milliards d'euros) au total.
"Pour faciliter ce processus, le gouvernement met à la disposition de ces établissements s'ils le désirent 25 milliards de livres (...) sous la forme de titres préférentiels ou de PIBS (titres portant un intérêt permanent)", explique le Trésor dans un communiqué.
"En outre, le gouvernement se tient prêt à apporter un soutien supplémentaire et régulier de 25 milliards de livres pour tous les établissements éligibles", ajoute-t-il.
L'EFFET DE PEUR
En échange, Londres exigera des banques de respecter certaines modalités et conditions, notamment de s'engager à soutenir les PME et les accédants à la propriété et de s'occuper de la rémunération des dirigeants.
Afin de pousser les banques à se prêter à nouveau entre elles, la Banque d'Angleterre met en place un Special Liquidity Scheme d'au moins 200 milliards de livres et elle pratiquera des adjudications en sterling à trois mois et en dollar à une semaine sur une durée de trois mois, acceptant une grande variété de collatéraux, jusqu'à stabilisation des marchés.
L'Etat émettra en outre des garanties sur de la dette courte et moyenne - de 36 mois au plus, en sterling, dollar ou euro - à destination des banques qui s'engagent à relever leurs fonds propres de première catégorie.
"Le gouvernement estime que les sollicitations de garantie seront de l'ordre de 250 milliards de livres; il surveillera cela toute en restant attentif aux positions en capital et aux volumes de prêt".
Interrogé par la radio de la BBC, Darling a assuré que l'argent du contribuable mobilisé pour ce programme serait récupéré au bout de trois ans.
"On parle d'à peu près 200 milliards de livres", a-t-il dit. "C'est ce qui est effectivement prêté au système bancaire et nous le récupèrerons, avec intérêt (...) au terme d'une période de trois ans", a-t-il dit.
Darling a admis que le gouvernement ne pouvait obliger les banques à avoir confiance les unes envers les autres et à se prêter à nouveau librement, mais il a déclaré: Ce qu'on peut faire, c'est réduire l'effet de peur; c'est ce qui empêche les banques de se prêter à plus long terme".
UN PAS EN AVANT SIGNIFICATIF
Pour le gouverneur de la Banque d'Angleterre Mervyn King, le dispositif d'aide aux banques est une étape cruciale de la résolution de la crise.
"Une recapitalisation de grande envergure et de 50 millions de livres au moins est une condition nécessaire pour rétablir la confiance au sein du système financier", observe-t-il dans un communiqué.
"La recapitalisation, le supplément de soutien de liquidité de la part de la Banque d'Angleterre et le nouveau dispositif de garantie représentent un pas en avant significatif de la résolution de la crise actuelle".
La BoE compte aussi relancer un projet de refonte des règles gouvernant la liquidité bancaire, touchant en particulier au guichet de l'escompte, projet qui avait été mis sous le boisseau depuis septembre en raison de la crise.
Les premières réactions des banques britanniques sont plutôt positives même si HSBC a fait savoir qu'elle comptait se passer de l'aide à la recapitalisation tout en respectant la nouvelle donne en matière de fonds propres "durs".
Les actions des banques britanniques ont dans un premier temps réagi en ordre dispersé mais pour la plupart, elles sont à présent orientées à la baisse, sauf HBOS qui flambe de 24%.
HSBC perd plus de 5%, Barclays 12,5%, Standard Chartered 12%. Royal Bank of Scotland et Lloyds TSB, qui avaient réagi en forte hausse dans un premier temps, perdent respectivement 3,00% et 2,7%.
Version française Wilfrid Exbrayat
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